mercredi 3 octobre 2007

La profession de foi de Georges Bush


Le moins que l'on puisse dire, c'est que Georges Bush a de la suite dans les idées. Sa position vis-à-vis du problème climatique est sans doute de plus en plus difficile à justifier aux Etats-Unis comme sur la scène internationale, mais il s'y tient. Coûte que coûte.

Par son absence remarquée lors de la conférence des Nations Unies portant sur l'avenir climatique qui se tenait à New York City la semaine dernière, Mr Bush a en effet adressé un message très clair au monde : il ne veut pas d'une politique contraignante de réduction des émissions au niveau mondial et il ne voit pas du tout d'un bon oeil l'agitation récente provoquée par la nécessité de réfléchir à un successeur au protocole de Kyoto.

Mais l'on aurait tort de croire que Mr Bush est inactif. En juin, il avait exprimé le souhait de réunir les 15 plus grands émetteurs de gaz à effet de serre de la planète pour discuter de la mise en place de politiques nationales de réduction des émissions. En septembre, fidèle à son projet, le président américain a profité de la présence opportune des représentants de ces pays à New York pour les inviter à venir passer deux jours avec lui à Washington. Là, il a à nouveau déclaré être convaincu que la solution au problème climatique passe avant tout par la mise en place de "mesures volontaires" de réduction des émissions.

Reste à déterminer qui sont les fameux individus qui vont s'atteler volontairement à la tâche de réduire leurs émissions dans un monde où le recours aux énergies fossiles reste de très loin la solution la plus rentable et la plus facile à court terme. Mais peut-être que Mr Bush envisage de donner l'exemple à la fin de son mandat?

Source image : http://www.rit.edu/~slrbbu/suv.gif

jeudi 20 septembre 2007

Le Groenland contre-attaque

Il ne sera pas dit que le Monde regardera fondre les glaciers du Groenland sans réagir. Après tout, même les situations potentiellement catastrophiques peuvent présenter un intéret économique, et il est encore temps d’éviter que la transformation des glaciers groenlandais en eau liquide ne bénéficie à personne.

Pour ce faire, rien de plus simple : il suffit de vendre l'eau qui résulte de la fonte en bouteille! Vu l'envolée de ce marché, l'idée a un vrai potentiel. Qui sait? Peut-être pourra- t’on même créer un mouvement de solidarité, du genre "pour chaque bouteille achetée, une congelée", histoire de limiter les dégâts...


dimanche 9 septembre 2007

Le cercle vicieux de l'Arctique


Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais depuis que les Russes sont allés planter un drapeau au pôle nord le 2 août, une sorte de "frénésie arctique" semble s'être emparée des diplomates. Que ce soit les Américains, les Canadiens, les Russes ou les Scandinaves, c'est à qui clamera le plus fort ses droits naturels et ancestraux sur les fonds arctiques et balaiera d'un revers de main méprisant les prétentions de ses concurrents.

Une fonte qui attire des convoitises...

La raison de cet intérêt subit? La fonte de l'Arctique s'accélère. Selon le National Snow and Ice Data Center, la surface gelée de l'Arctique en août 2007 était d'ores et déjà inférieure au précédent record, enregistré en 2005 à la fin du mois de septembre. La rapidité de la fonte des glaces a été telle cet été que même les modèles les plus pessimistes se sont révèlé incapables de la prévoir correctement. Voici de quoi réjouir plus d'un investisseur, pour qui la disparition des glaces permet d'envisager à moyen terme un accès aux réserves d'hydrocarbures des fonds artiques, qui pourraient se révéler supérieures à celles de l'Arabie Saoudite.

... et qui soulèvent des inquiétudes

Pourtant, la fonte de l'Arctique est loin d'être un sujet de réjouissance pour tout le monde. Pour les scientifiques, c'est même plutôt un énorme sujet d'inquiétude. Les pôles sont en effet un fantastique amplificateur potentiel du réchauffement climatique. Ceci vient du fait qu'il existe une différence fondamentale entre la glace et l'océan liquide : là où la première renvoie plus de 80% des rayons du soleil vers l'atmosphère, le second les absorbe à plus de 90%. A l'heure actuelle, la calotte glaciaire des pôles permet de limiter le réchauffement climatique en évitant qu'une partie de l'énergie solaire reçue par la Terre ne soit absorbée par cette dernière. Mais si la glace des pôles se met à fondre, cette énergie sera absorbée par la mer, ce qui favorisera l'augmentation de la température moyenne des océans. Or, plus une masse d'eau est chaude, plus elle se dilate, plus son niveau augmente...

Le paradoxe climatique

La nouvelle "frénésie polaire" des pays du Nord, qui ne voient dans la fonte de l'Arctique qu'un accès potentiel à des ressources fossiles jusque là inaccessibles, est typique d'un des grands paradoxes de ce début de 21ème siècle : alors que le réchauffement climatique prend de plus en plus l'allure d'un défi planétaire extrêmement urgent, l'inquiétude sur ses conséquences est d'une manière générale surtout manifestée par les spécialistes du domaine. Cette situation est exactement l'inverse de ce que l'on observe dans nombre de domaines scientifiques ayant des implications pour le grand public, tels que l'énergie nucléaire ou les OGM.

Pourquoi cette différence? Peut-être parce que les effets du réchauffement sont pour l'instant surtout visibles dans des zones peu peuplées. Peut-être aussi parce qu'il nous est difficile d'imaginer que les évènements qui se produisent actuellement en Arctique puisse avoir un impact déterminant sur nos vies et celles de nos enfants. Peut-être enfin parce qu'il est plus facile de faucher un champs de maïs que de modifier nos modes de vie.

Source :
Field Notes from a Catastrophe, de Elizabeth Kolber
t

Photo :
http://www.interet-general.info/IMG/Norvege-Region-Tromso-Paysage-Arctique-1.jpg

vendredi 7 septembre 2007

Joking British Airways


When my friend Sid announced that she was planning a trip to England, everyone asked her whether she was going to offset her carbon emissions.

A very fashionable concept

The question might sound weird at first sight, but it has become increasingly frequent in environmentally conscious circles in America. The general idea behind the nebulous "offsetting" term is to help the persons who feel guilty about their carbon emissions to "offsett" them by contributing financially to projects that might either compensate or spare an equivalent amount of carbon that would otherwise be vented into the atmosphere.

Though the concept might seem quite simple, it is in fact pretty tricky. First, the person who dearly wishes to diminish one's ecological footprint will discover that the estimation of one's carbon emissions can vary wildly according to the company chosen. Then, one will discover that even if the amount of emissions is similarly estimated, the price of a tonne of carbon might also be subjected to wide variations.

British Airways: a "green" company?

But let's go back to Sid, who might be considered lucky; as it proudly advertises, British Airways (more commonly known as BA) is actually the first airline that introduced the possibility of carbon compensation to its customers. One might then easily imagine that this means more experience in the offsetting business and therefore better projects. Indeed, for the curious customer willing to spend a few minutes investigating how his money will be used, the "climate projects" funded by BA may well look quite interesting.

Did the inhabitants of the Atlantis have the right light bulbs?

One of them is focused on the Marshall Islands, an archipelago that is (according to BA) "under severe threat from rising sea levels due to global warming". To say this straight, this doesn't sound like much fun for its inhabitants, who may well feel a bit concerned by the fact that each rountrip Boston/Manchester emits as much carbon than two Chineses during a year. But why should they worry? BA has the solution! The company is installing highly efficient compact fluorescent lamps in a third of the Majoro island's homes. No doubt that this is going to make all the difference when sea levels will indeed start to rise seriously... It's a pity that the environmentally conscious website of BA does not include a notice saying that a better option to fight global warming and insure a future to the Marshall Islands would be not to take the plane.

Believe it or not, but Sid has decided not to compensate her carbon emissions.

Picture: http://www.cartoonstock.com/newscartoons/cartoonists/gri/lowres/grin548l.jpg

samedi 1 septembre 2007

L'humour anglais de British Airways

Lorsque mon amie Sid a annoncé qu'elle allait en Angleterre, son entourage lui a demandé si elle comptait compenser ses émissions carbone.

La grande mode de l'offsetting

La question est au premier abord surprenante. Pourtant, elle est devenue remarquablement banale dans les milieux marqués par une conscience environnementale aux Etats-Unis : "l'offsetting", car c'est le nom de cette pratique, a le vent en poupe. L'idée consiste à estimer la quantité de carbone relâchée dans l'atmosphère par une activité et à payer une entreprise spécialisée pour qu'elle compense les émissions générées en mettant en place des projets supposés absorber ou économiser une quantité de carbone équivalente.

BA : une compagnie modèle?

Sid a de la chance : elle peut si elle le souhaite compenser les émissions générées par le trajet Boston/Manchester grâce aux efforts de British Airways (BA pour les intimes)! Sur son site internet, la compagnie annonce en effet avec fierté qu'elle est la première compagnie aérienne au monde à avoir introduit la possibilité de compenser ses émissions. Selon BA, les 1,14 tonnes de CO2 générées par l'aller/retour peuvent être compensées par le paiement volontaire de 8,57£ (environ 13€).

Les habitants de l'Atlantide avaient-ils les bonnes ampoules?

A quoi va servir cet argent? BA est une compagnie transparente : ses "projets climatiques" sont décrits sur son site internet. L'un d'entre eux concerne les îles Marshall, qui sont fortement menacées (selon ses propres termes) par un engloutissement lié à la montée du niveau des océans. Je ne sais pas vous, mais moi, à la place des habitants des îles Marshall, je serais quand même un peu inquiête de savoir que chaque vol A/R transatlantique correspond au moins à deux fois les émissions annuelles d'un Chinois. Mais pas de panique! BA a la solution : la contribution volontaire de 8,57£ va servir à remplacer 1/3 des ampoules de l'une des îles de l'archipel par des ampoules économiques en énergie! Voilà qui va certainement faire toute la différence quand l'océan engloutira les îles Marshall... Dommage que BA ne signale pas qu'une solution plus efficaces pour sauver l'archipel serait de ne pas prendre l'avion...

Croyez le ou non, mais Sid a décidé de ne pas compenser ses émissions.

Image: http://jonjayray.googlepages.com/offsets.gif

mercredi 22 août 2007

Le noir secret du labour


Lorsqu'on pense aux émissions de CO2 des Etats-Unis, on imagine en général des centrales à charbon et des grosses voitures. On visualise plus rarement les immenses surfaces agricoles de la Corn Belt et des grandes plaines. Pourtant, le sol des grandes plaines émet du CO2.

Le carbone: un élément qui a la côte auprès des organismes vivants

Voici l'explication: comme tous les êtres vivants, les plantes ont besoin de carbone pour vivre. Ce carbone, elles l'absorbent dans l'air sous forme de CO2 et elles l'utilisent pour construire leurs cellules. Lorsqu'elles meurent, les plantes se décomposent et le carbone qu'elles contiennent se retrouve dans la terre. Dans les grandes plaines américaines, des milliers de générations successives de plantes ont entrainé la production d'une couche superficielle de terre riche en carbone, qu'on appelle l'humus.

Mais ce carbone ne reste pas forcément dans le sol: en présence d'oxygène, l'humus est en effet consommé par des bactéries, qui vont rejetter le carbone qu'il contient dans l'atmosphère sous forme de CO2. En pratique, leur action équivaut à brûler de la matière organique végétale enfouie depuis des millénaires dans le sol. Voilà qui devrait nous sembler familier, puisque c'est exactement ce que nous faisons lorsque nous mettons du pétrole dans une voiture!

De l'absorption à l'émission: l'impact européen

La respiration bactérienne n'est pas un problème en soi. Ce qui est problématique, c'est lorsque la quantité d'humus en contact avec l'oxygène augmente suffisamment pour que le rejet de CO2 soit supérieur à l'absorption des plantes. C'est ce qui est arrivé lorsque les premiers agriculteurs d'origine européenne se sont installés dans les grandes plaines, amenant avec eux une technique de culture utilisée depuis des siècles en Europe : le labour.

Le labour consiste à retourner les premiers 15 ou 20 centimètres du sol de manière à casser les racines des mauvaises herbes et à diminuer les populations de limaces. C'est donc en premier lieu une technique de lutte contre les ravageurs. Malheureusement, le retournement du sol permet aussi l'exposition à l'air libre de l'humus enfoui depuis des millénaires dans un milieu sans oxygène... Et voilà comment le sol se met à émettre du CO2.

Le potentiel insoupçonné du sol

A combien s'élève la contribution du travail du sol? Par le passé, elle a été importante : Rattan Lal, un podologue de l'Ohio State University, estime que depuis les débuts de l'agriculture, les pertes de carbone par le sol se seraient élevées à 80 millions de tonnes. En fait, jusque dans les années 50, le sol aurait été la principale source d'émissions cumulées de CO2, bien avant le pétrole et le charbon. Le siècle de culture des grandes plaines aurait à lui seul entraîné l'émission de plus de 100 tonnes de CO2 à l'hectare!

La bonne nouvelle, c'est que si les sols peuvent perdre du CO2, ils peuvent aussi le réabsorber. Il "suffit" pour cela d'abandonner la technique du labour (ce qui implique toutefois des inconvénients importants en terme d'usage accru des pesticides). Selon certaines estimations optimistes, chaque hectare non labouré en Iowa pourrait ainsi capturer plus de 2 tonnes de CO2 par an. Et si toutes les terres agricoles américaines étaient cultivées sur ce principe, le sol pourrait potentiellement absorber plus de 100 millions de tonnes de CO2 par an, assez pour compenser la moitié des émissions liées aux véhicules américains! L'administration Bush, toujours à la recherche de solutions pour ne rien changer au mode de vie américain, est d'ailleurs très intéressée par ce potentiel...

Une nouvelle technique de capture du CO2?

Là où le bât blesse, c'est les agriculteurs américains ne sont pas idiots. Si l'intérêt du non-labour se limite à capturer un gas invisible dans le sol, alors que les coûts d'usage des pesticides augmentent, le jeu en vaut difficilement la chandelle. Mais voilà : il y a de plus en plus de sociétés aux Etats-Unis qui se déclarent prêtes à payer pour compenser leurs émissions (c'est ce qu'on appelle l'offsetting). Le résultat, c'est que selon l'Iowa Farm Bureau, 2000 agriculteurs de l'Iowa sont d'ores et déjà payés quelques dollars pour chaque hectare non-labouré. Un nouveau débouché agricole viendrait-il de se créer? Suspens...

Sources:
The dirty Truth about plowing, ScienceNOW Daily News.

Photo : http://www.manishin.com/photos/best_photos/Images/great_plains.jpg

vendredi 17 août 2007

En attendant la technologie miracle...


Sans doute las d'attendre la technologie-miracle qui résoudra tous nos problèmes climatiques, les botanistes ont recours aux bonnes vieilles recettes traditionnelles. A l'initiative des Kew Royal Botanic Garden en Angleterre, ils sont en train de récolter à la hâte les graines de 10% des espèces végétales de la planète.

La situation est en effet alarmante; selon certaines estimations, plus de 40% des plantes européennes et africaines pourraient se retrouver menacées d'extinction d'ici 2080 à cause du changement climatique. Or, en plus d'être des pompes à CO2, certaines de ces plantes sont peut-être des sources présentes ou futures d'alimentation, de médicaments, de fibres, de matériaux de construction ou de carburant... dont la disparition risque de nous coûter très cher.

Alors, des candidats pour adopter un bébé palmier?

vendredi 10 août 2007

Navajos: the curse of coal


"Why pick on the little Navajo nation when it is trying to help itself?" asked the Navajo tribal head Joe Shirley to the New York Times in a recent interview.

A new hope for the Navajo nation?

The reason for this bitter question lies in the heating controversy surrounding the planned construction of a 1500 megawatts coal-fired plant on the Navajo ground in New Mexico. The plant, whose planned name is Desert Rock, would provide hundreds of jobs, might help send electricity to 20,000 remote homes on the reservation and would hopefully bring $50 millions of yearly incomes to the Navajo tribe. Joe is right: these prospects sound appealing for a people whose major source of income remains the American government's grants.

Uranium and coal: a blessing or a curse?

But past experiences make the Desert Rock prospect look grimmer than advertised by Joe Shirley; the Navajo people have already suffered a lot from the hidden riches of their underground. The exploitation of their uranium mines is probably responsible for cancer-rates among teenagers that are 17 times higher than the national level. The San Juan River, which crosses the reservation, is heavily contaminated with mercury. Ozone levels in some parts of the Navajo lands are higher than permitted levels. And finally, the reservation is already plagued by two coal-fired facilities that makes the air-quality on the reservation the worst in the whole state of New Mexico.

The threat of global warming

Some people, especially non-members of the tribe, also worry about the CO2 emissions that Desert Rock would generate. Coal is already responsible of half of the 59 millions tons of CO2 emitted by New Mexico each year (20% more than the average contribution nationwide), and the new plant would add 12 millions tons of CO2 to this balance sheet. The state of New Mexico has already declared that it would not grant the plant tax breaks. But ironically, the ones who have the most to lose from the global warming are the Navajo themselves.

Since the beginning of the drought that plagues the Southwest since 1999, the traditional farming of the Navajo has become increasingly difficult, and has driven more and more people (especially the youngsters) out of the countryside. Once in the cities, the Navajos lose their mother tongue and their culture. If the Southwest climate changes for good toward a drier one as is predicted, it might become increasingly difficult for the tribe to maintain its traditions.

Like so many Native-American stories, the Navajo story is a sad one. It is the story of a proud people who has lost most of its land and is now struggling to survive with the most valuable currency it possesses, energy. It is the story of a people that might lose its soul because of this currency. As one Navajo interviewed by NPR was saying, "dry days might be here to stay. And we don't even remember how to do a rain-dance".

Photo Navajo Plant: http://www.cpluhna.nau.edu/images/navajopwrplant.jpg

Photo Mother and Child: http://mle.matsuk12.us/american-natives/sw/navajo-mother.jpg

lundi 6 août 2007

L'indépendance énergétique du Danemark


Une fois n'est pas coutume, je ne vais pas aujourd'hui vous parler des Etats-Unis, mais du Danemark (dont la capitale, pour la dernière fois, n'est pas Stockholm!) .

Il y a quelques temps, j'ai assisté à une conférence donnée par l'ambassadeur du Danemark aux Etats-Unis, Mr. Arne Friis Pedersen. Mr. Pedersen, après nous avoir prévenus avec une honnêteté remarquable que "son travail était de faire aimer le Danemark", nous a donné une analyse détaillée et résolument positive du pays. Après avoir abordé avec habileté la position pour le moins ambigue du pays par rapport à l'Union Européenne, il a indiqué (ce qui m'a fait dresser l'oreille) que le Danemark avait réussi à atteindre le Graal américain, en passant d'une situation de dépendance énergétique à 99% en 1973 à une indépendance énergétique totale en 2006.

J'avoue que l'affirmation m'a laissée assez incrédule. J'ai donc été vérifier sur le site du Danish Energy Autority. Et ce que j'ai trouvé m'a laissée stupéfaite : en 2005 (les derniers chiffres disponibles), le Danemark n'était pas 100% indépendant énergétiquement, mais 156% indépendant, ce qui lui donnait le statut enviable de seul pays de l'Union Européenne à être auto-suffisant sur le plan énergétique!

Seulement voilà : il ne suffit pas d'être indépendant énergétiquement pour posséder une économie décarbonisée. Malgré l'image très "verte" du Danemark (en 2005, le pays a réussi à réduire ses émissions de 6,4% par rapport au niveau de 1990, un succès dont de nombreux pays de l'Union pourraient certainement prendre de la graine!), il n'en reste pas moins que ses émissions de gaz à effet de serre par habitant sont parmi les plus élevées d'Europe.

Comment est-ce possible? L'affreuse vérité, c'est que même les leaders mondiaux de l'éolienne se heurtent parfois à un problème délicat : l'absence de vent. Et dans cette situation, les Danois ont recours, faute d'accès à l'hydroélectricité et à cause de leur position anti-nucléaire, à des générateurs particulièrement polluants, qui consomment des quantités importantes de carburants fossiles. Comme quoi, il y a peut-être bien quand même quelque chose à améliorer dans ce royaume de Danemark...

Photo : Soenderhede un jour d'été, vu par Nicolas

lundi 30 juillet 2007

Le scepticisme climatique : une opinion très largement influencée par la politique

Ils sont partout : sur les blogs, sur les forums de discussion, dans les journaux et dans la rédaction des articles de Wikipedia. "Ils', ce sont les "sceptiques climatiques", les représentants d'un courant de pensée qui reste encore très important aux Etats-Unis.

Si le changement climatique est aujourd'hui perçu comme une réalité par une majorité des Américains, ses causes sont encore fortement débattues : en janvier 2007, seuls 53% de la population américaine pensait que le réchauffement était lié aux activités humaines. Tour d'horizon d'un point de vue souvent étroitement lié à des convictions politiques...

  • Dans l'esprit des sceptiques, le réchauffement climatique est une idée de gauche (bien qu'il reste à déterminer comment un phénomène physique peut manifester une affiliation politique). En sa qualité de "gauchiste", la personne qui considère que le CO2 émis lors des activités humaines est responsable d'une augmentation moyenne de la température terrestre est donc assimilée aux altermondialistes, aux environnementalistes et aux communistes (plus précisément aux Stalinistes). L'idée sous-jacente à ce classement étroit est que le "réchauffiste" est un fervent adversaire de l'économie de marché et du capitalisme (donc un non-patriote) et qu'il souhaite ardemment imposer un régime coercitif sur la population américaine au nom du sacro-saint Environnement.
  • Les anti-effet de serre ont une dent contre le GIEC. Le panel d'experts est composé selon eux de "non-scientifiques" et de gens politiquement biaisés en faveur d'un impact humain sur le climat (pour information, non seulement le GIEC est bel et bien composé de scientifiques, mais certains éminents sceptiques, comme Patrick Michaels, en font partie. La majorité des scientifiques s'accordant sur le fait que les activités humaines sont responsables d'une augmentation de l'effet de serre, le GIEC reflète ce consensus). Les sceptiques remettent particulièrement en cause le fait que les conclusions du GIEC s'appuient sur des modélisations informatiques, ce qui leur parait une source d'erreur et de simplification.
  • L'existence d'un réchauffement est généralement admise. Ce qui pose problème, c'est le concept que les êtres humains puissent y être pour quelque chose. En conséquence, les sceptiques consacrent une énergie considérable à appuyer lourdement sur les moindres brêches observées dans les derniers résultats de la recherche climatologique et brandissent comme des étendards leurs théories alternatives. Leur préférée est sans doute l'idée émise par le Danois Henrik Svensmark que les variations climatiques sont le résultat de cycles solaires. Bien que présentant indéniablement un certain mérite, cette théorie concerne toutefois des cycles de 11 ans en moyenne et ne peut donc pas vraiment expliquer des variations à long terme (ce que les sceptiques ont tendance à passer sous silence).
  • Les anti-réchauffement confondent régulièrement météo et climat (ils ne sont pas les seuls) : ils écriront ainsi triomphalement les jours de neige ou de pluie pour annoncer "qu'ils vous avaient bien dit que toute cette histoire était une fraude".
  • Enfin, les sceptiques se targuent d'être des libres-penseurs. Contrairement au reste de la population américaine, ils ne tombent pas dans "l'hystérie collective". Leur modèle? Galilée, qui en défendant opiniâtrement le fait que la Terre tourne autour du Soleil, a démontré que l'on peut être seul contre tous et avoir raison. C'est vrai, mais c'est faire bien peu de cas du fait que la science avance d'une manière générale par consensus...
Photo : http://unitedcats.files.wordpress.com/2007/05/global_warming-_proof.jpg

vendredi 27 juillet 2007

From coal to Coke: the improbable path


"If we don't solve the coal problem, we cannot solve the climate problem" said Princeton physicist Robert Williams to Science in a recent interview.

Climate's biggest challenge

As China keeps putting two new coal-fired power plants online each week and the 600 coal facilities of America are responsible alone of roughly 30% of the 7 billions metric tons of CO2 emitted each year (more than the emissions of all the cars and other industries of the country combined), coal looks indeed more and more like one of the biggest challenge of the climate issue.

The trouble with coal is that no one really wants to get rid of an energy source which is four to five times more abundant than oil, cheap and for once ideally distributed among developed countries (1) instead of being found in improbable locations plagued with chronic political instability.

But as the idea of a near-term cap on carbon dioxide emissions gains support in America, the industry of the by-far-dirtiest-of-all-fossil-fuel (2) is submitted to more and more intense scrutiny. This sudden awareness has prompted a rising interest in the currently only known solution to the coal-fired plants emissions problem: the carbon capture.

Carbon capture: a simple concept plagued with technical challenges

In theory, carbon dioxide capture is pretty simple: one grabs the CO2 emitted by the coal combustion before it gets vented into the atmosphere. But the concept is actually tricky. Current off-the-shelf technologies need at best to be submitted to a thorough improvement if the plant is still supposed to be profitable.

The technique that would be the easiest to implement on most existing plants consists in using a molecule called monoethanolamine (MEA) to bind the CO2 right after the coal combustion and thus to separate it from the other gases emitted by the plant. But in order to capture 96% of the plant's CO2 emissions, 40% of the energy previously sold to the public would have to be used... which would raise the electricity bills by 36% or more! With improved efficiency, the technique should still not permit the capture of 90% of the CO2 emissions without cutting the net output of the plant by 30%.

From coal to Coke

And even if the technical problems got solved, a daunting question still remains: what are we going to do with all this CO2? The coal-fired plant of Warrior Run in Maryland found an interesting answer to this question: the 5% of its CO2 emissions that actually get captured are sold to beverages gas distributors and then incorporated in your Coke. Too bad that no one seems to have realized that unless the Coke bottle is never open, the CO2 that has been so painfully trapped is going anyway to take a short cut to the atmosphere...

(1) Coal known reserves are found in the United States (25.4%), the ex-URSS (23.4%), Europe (12.4%), China (11.6%) and India (8.6%).

(2) For the same amount of energy produced, coal emits 25% more CO2 than oil and 40 to 50% more CO2 than natural gas.

Sources:
Making Dirty Coal Plants Cleaner, Science, 13 July 2007, pp. 184-186
Le Plein s'il vous plait! by Jean Marc Jancovici and Alain Grandjean

Photo:
itsgettinghotinhere.org/tag/uncategorized/

jeudi 26 juillet 2007

Petite histoire de l'effet de serre (3)

Le CO2 revient de loin. Après avoir fasciné les scientifiques du 19ème siècle, il a eu droit (comme tous les grands de ce monde?) à sa traversée du désert. Mais grâce au travail rigoureux du physicien américain Gilbert Plass, la théorie de l'effet de serre revient sous la lumière des projecteurs à la fin des années 50 : pour la première fois depuis plusieurs décennies, les impacts potentiels du fameux gaz atmosphérique intriguent à nouveau la communauté scientifique.

Une théorie qui demande à être démontrée

L'ennui, c'est que la théorie de Gilbert Plass reste... une théorie. De son propre aveu, elle ne pourra être vérifiée que lorsque l'on disposera 1) de la tendance suivie par les températures terrestres au 20ème siècle et 2) de la démonstration que la concentration de CO2 atmosphérique a bel et bien augmenté au cours du même siècle.

La grande découverte de Keeling

S'il faudra attendre l'an 2000 pour pouvoir officiellement annoncer que la Terre s'est réchauffée de 0,6°C au cours du 20ème siècle, l'augmentation de la concentration de CO2 dans l'atmosphère sera quant à elle rapidement observée par un jeune chercheur de Caltech, David Keeling, qu'on peut sans risque qualifer d'obsédé du CO2.

En 1954, Keeling (un bricoleur) réalise à la main un instrument de mesure de la concentration du CO2 atmosphérique. Armé de ce précieux outil, il va se mettre à prendre des mesures compulsives de son gaz fétiche. Cette obsession l'amènera à une découverte capitale: il réalise que contrairement à la croyance collective, la concentration atmosphérique du CO2 est une valeur planétaire et non pas locale. Ceci implique que l'on peut mesurer précisément la concentration du gaz à partir d'un seul site. Ce site, ce sera Mauna Loa, à Hawaï, l'archipel le plus perdu de la planète. Les mesures commencent en 1958 et voici ce qu'elles montrent :

Un tel résultat est de nature à mettre un scientifique en alerte. Keeling ne fera pas exception. Dès 1959, lorsqu'il constate l'augmentation de la concentration de CO2 atmosphérique pour la première fois, il prend rendez-vous avec Guy Callendar, le défenseur de la théorie de l'effet de serre envers et contre tous et celui qui connaît le mieux le sujet. Ensemble, ils estiment que le niveau préindustriel de CO2 atmosphérique était probablement de 290 ppm.

Hansen, de Vénus à la Terre

La concentration atmosphérique de CO2 frôle les 340 ppm lorsqu'un brillant physicien et astronome américain fait une entrée remarquée sur la scène du changement climatique. James Hansen (encore lui) est initialement un spécialiste du climat de notre voisine Vénus. Par le plus grand des hasards, ce domaine de recherche fait également de lui un spécialiste de l'effet de serre, car Vénus (qui a peut-être eu un climat comparable au nôtre dans le passé) est aujourd'hui caractérisée par une très forte concentration de carbone dans son atmosphère. En conséquence, elle possède des températures 350 000 fois plus élevées que celles observées sur Terre.

Hansen, bien que très satisfait de se consacrer à une planète autre que la sienne, accepte en 1975 de participer à un projet ambitieux de modélisation de l'influence des gaz à effet de serre sur le climat terrestre. C'est le déclic : se rendant rapidement compte qu'il est bien plus intéressant scientifiquement de se consacrer à une planète dont le climat est en pleine modification, Hansen abandonne définitivement ses recherches sur Vénus en 1978 et se consacre à temps plein à la planète bleue.

Les sombres prédictions de l'astronome

Dès 1979, il crée une révolution en publiant une étude qui prédit qu'un doublement de la concentration de CO2 atmosphérique par rapport au niveau pré-industriel devrait résulter en un accroissement moyen de la température terrestre de 4°C, soit une température supérieure à celle observée il y a 100 millions d'années, lors de l'âge des dinosaures... Ce réchauffement est 2°C plus élevé que celui estimé en 1967 par Suyukoro Manabe, le seul chercheur à avoir réalisé une étude aussi complète que la sienne.

Face à l'émoi suscité par cette prédiction, le président Carter va demander la création d'un panel d'experts chargé d'estimer la validité scientifique de ces deux études. Le panel conclura à un réchauffement compris entre 1,5 et 4,5°C en cas de doublement de la concentration atmosphérique de CO2 (ce qui est très proche des conclusions actuelles de son descendant, le GIEC).

Vostok ou la fin d'un débat

En 1987, année où le GIEC est officiellement créé, l'importance du CO2 dans les variations de la température planétaire est élégamment démontrée par une équipe franco-russe, qui présente dans Nature les résultats obtenus lors de l'analyse d'une carotte de glace de 2033 mètres, extraite à la station antarticque de Vostok.


Ces résultats montrent de façon limpide que les températures et la concentration atmosphérique de CO2 se sont suivies étroitement au cours des 160 000 dernières années. De plus, l'effet de serre généré par la concentration atmosphérique de CO2 est de la bonne magnitude pour expliquer les changements de températures observés. Pour la majorité des scientifiques, cette démonstration clôt le débat : une augmentation de la concentration atmosphérique de CO2 entraîne bien un accroissement de la température terrestre. Et lorsque les activités humaines sont responsables de la combustion de l'équivalent de plus de 400 ans de toute la végétation terrestre en moins d'une année (comme c'est le cas en ce moment), et devraient entraîner un doublement de la concentration de CO2 atmosphérique pré-industrielle aux alentours de l'an 2025, il devient difficile de nier que l'homme a bel et bien un impact sur le climat!

Du débat scientifique au débat politique

Mais au moment même où le débat scientifique se clôt, une guerre sans merci débute. Le CO2 vient de faire une entrée remarquée en politique...

Pour ceux qui n'ont pas suivi...

Les interrogations du 19ème siècle : Petite histoire de l'effet de serre (1)
La grande traversée du désert, de 1903 à 1955 : Petite histoire de l'effet de serre (2)

Sources :

Données historiques : Thin Ice, de Mark Bowen
Graphe 1 : Evolution de la concentration atmosphérique de CO2 dans l'atmosphère ou courbe de Keeling, http://www.wooster.edu/geology/lackey/110.html
Graphe 2 : L'étroite relation entre concentration atmosphérique de CO2 et températures démontrée par la carotte de glace de Vostok
http://www.sierraclub.ca/national/programs/atmosphere-energy/climate-change/ten-myths.html

lundi 23 juillet 2007

Floride : paroles, paroles...

Décidément, rien ne va plus au parti Républicain. Voilà maintenant que le gouverneur du quatrième Etat le plus peuplé du pays s'affiche comme un défenseur de la cause climatique !

Charlie Crist, gouverneur de l'Etat de Floride, vient en effet d'annoncer qu'il comptait mettre en place un plan ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre de la péninsule. L'objectif affiché est de diminuer les émissions de 25% par rapport au niveau de 1990 d'ici 2025 et de les réduire à 1/5ème de leur niveau de 1990 d'ici 2050.

Pour atteindre ces objectifs, le gouverneur semble envisager le recours à la fameuse recette-miracle de la chasse au gaspillage (qui demande encore à faire ses preuves). Il veut ainsi promouvoir une meilleure efficience énergétique des usines, des bâtiments et des véhicules de Floride et a insisté sur la place (plus) importante qu'il compte accorder aux énergies renouvelables comme le solaire.

Un Etat particulièrement vulnérable

Il est vrai qu'à priori, la Floride a beaucoup à perdre en cas de réchauffement climatique majeur : avec une altitude moyenne de 30 mètres et plus de 2000 kilomètres de côtes, l'Etat est particulièrement vulnérable à la montée du niveau des eaux. Les 2/3 de ses précieuses plages, qui sont aujourd'hui sa principale source de revenue, pourraient d'ailleurs avoir disparu en 2100, entraînant avec elles la perte de richesses naturelles comme les Everglades ou les récifs coraliens (qu'adviendra-t'il de Disneyworld?). Selon l'étude réalisée par l'Union of Concerned Scientists, certaines zones de l'Etat seront également susceptibles de connaître de longues périodes de sécheresse, tandis que l'intensité des tempêtes tropicales pourrait augmenter. Selon le New York Times, il y a d'ores et déjà en Floride beaucoup de propriétaires qui peinent à trouver une compagnie disposée à les assurer...

Les ambitions du gouverneur Crist s'inscrivent dans la nouvelle mouvance républicaine

L'action du gouverneur Crist vise clairement à lancer son Etat et lui-même sur les traces de politiciens d'affiliation républicaine dont la prise de position en faveur de l'environnement a été très médiatisée ces derniers temps, comme le gouverneur de Californie Arnold Schwarzenegger ou le maire de New York City Michael Bloomberg. Mais ses déclarations ambitieuses seront-elles vraiment suivies dans la pratique par une véritable réduction des émissions?

De la théorie à la pratique : le grand fossé

Selon le New York Times, celà reste à vérifier. Pour commencer, il semble improbable que la Floride mette réellement en place des standards de consommation énergétique des véhicules, car elle n'y est pas autorisée sous la réglementation fédérale actuelle (et même si elle l'était, elle serait selon toute probabilité bloquée par la bataille légale qui continue à faire rage entre les Etats et l'Environmental Proctection Agency).

D'autre part, le manque d'enthousiasme de la population vis à vis de ces mesures rend leur pérennité douteuse. Les actions promues par le gouverneur d'un Etat peuvent en effet très bien être annulées par son successeur. Dans un système démocratique, seul un vrai support populaire peut assurer le maintien d'engagements politiques, surtout si ceux-ci sont censés s'étaler sur les quatre prochaines décennies.

Un tel support faisant pour l'instant défaut en Floride, il y a fort à parier que les engagements du gouverneur Crist ne seront guère plus que des mots. Il reste à espérer que lesdits mots inciteront les instances fédérales à se pencher enfin sérieusement sur le problème climatique. Pour que l'Etat du Soleil ne devienne pas la Venise de l'Amérique.

Photo : http://blog.bmykey.com/immobilier/

vendredi 20 juillet 2007

An insight into a warmer future?

MILK and DAIRY PRICES

You may have heard that milk prices worldwide are rising at the
fastest rates ever. Unfortunately, prices for other dairy
products will be higher for the foreseeable future due to :
  • An increased worldwide demand for milk
  • Higher transportation costs
  • Increased corn prices (the primary dairy cattle feed) because of the growth of the ethanol industry

Here is the notice that can now be found next to the jugs of milk in some grocery stores in the Boston area. If the price of milk by-products is still relatively stable, consumers now have to pay almost 4$ to buy a gallon of milk, which represents a 92 cents increase in comparison with last year.

It is undoubtedly a bad news for milk, cheese and other pizza addicts, but this notice is probably a very accurate insight of the life we will have in a warmer world. According to the Northeast Climate Impacts Assessment Synthesis Team, milk production in the Northeast (but also in the rest of the United States) is likely to be strongly impacted by warmer summers, as ruminants are highly sensitive to temperatures above 24°C (75°F). As summers get warmer, it will become more and more necessary to invest large amounts of money into new cooling capacities to ensure a stable production. Of course, such investments are more than likely to have an impact on milk prices...

But milk production will also be negatively impacted in other parts of the world. The current increase of prices is partly due to the catastrophic drought currently experienced by the traditional suppliers of Asia's growing thirst for dairy products, Australia and New Zealand. Such production shortenings are likely to become common sight in the future.

Finally, milk prices are impacted by the fact that the percentage of the American corn crop used for the ever-increasing ethanol production has been rising sharply from 12% in 2004 to 20% in 2006, according to the American Coalition for Ethanol. No wonder then that milk prices are soaring! We probably better have to get used to black coffee... in our new warmer world.

Special thanks to Lucas Guillet and Claire Notin for the well-documented report on climate change and agriculture in the United States.

Photo :
www.mothercow.org/oxen/got-milk.html

mercredi 18 juillet 2007

Petite histoire de l'effet de serre (2)

Reprenons la saga de l'effet de serre là où nous l'avons laissée, en 1903.

Au moment où le prix Nobel Svante Arrhenius prend conscience de la capacité humaine à modifier le climat (ce qu'il voit d'ailleurs comme une bonne chose pour l'agriculture des pays nordiques, donc pour l'humanité dans son ensemble...), la théorie qu'il a contribué à développer tombe soudainement en défaveur.

Ce brusque désintérêt est lié au développement dans les premières années du 20ème siècle de la spectrométrie. La jeune discipline, encore mal maîtrisée, fournit rapidement des résultats qui vont amener la communauté scientifique à conclure que l'impact potentiel du CO2 sur le climat est négligeable. Les interrogations du siècle précédent sont alors rejetées aux oubliettes.

Les doutes solitaires de Callendar

Pendant près de cinq décennies, la seule personne qui continue à s'intéresser au CO2 est un obscur ingénieur britannique, Guy Stewart Callendar. Seul contre tous, il va consacrer ses nuits à démontrer que les émissions croissantes de carbone dans l'atmosphère ont non seulement un impact sur le climat, mais que cet impact est déjà visible.

En 1938, Callendar estime ainsi, lors d'une présentation donnée devant la Royal Meteorology Society, que la concentration moyenne de CO2 dans l'atmosphère a augmenté de 6% depuis le début du siècle. Il observe également un léger réchauffement moyen au cours des 50 années précédentes et lie les deux phénomènes.

De façon assez prévisible, ces réflexions solitaires sont accueillies avec un intérêt plus que modéré. Comme le reste de l'Europe, la Grande Bretagne est alors confrontée à des questions plus urgentes qu'une incertaine élévation de la température mondiale, surtout si cette élévation, comme le pense Callendar, est vouée à avoir des conséquences positives pour le monde, centré comme il se doit sur la Grande Bretagne...

De la guerre froide...

Mais le CO2 n'a pas dit son dernier mot. Dans le contexte politique de la guerre froide, le réchauffement climatique va en effet revenir de façon plutôt paradoxale sur le devant de la scène, porté par la recherche militaire.

Dans les années 50, l'armée américaine investit de vastes sommes dans la recherche sur les rayons infra-rouges, dont les propriétés (en particulier l'intéressante capacité à être émis jour comme nuit par les êtres vivants à sang chaud comme les humains) ouvrent des perspectives militaires inédites. Ces recherches, qui vont contribuer à révolutionner les techniques de guerre, vont aussi permettre de découvrir l'existence d'une fâcheuse erreur dans le fameux protocole expérimental qui a innocenté le CO2 quelques décennies auparavant : les pressions appliquées expérimentalement étaient en fait bien supérieures à celle observée dans l'atmosphère de notre planète... Dans les conditions atmosphériques terrestres, le CO2 est bel et bien un important gaz à effet de serre!

... au réchauffement planétaire

Cette découverte va déclencher l'intérêt d'un physicien américain, Gilbert Plass. Employé par l'armée américaine pour travailler sur les rayons infrarouges, Plass met à profit un congé sabbatique réalisé à l'Université du Michigan en 1954-55 pour créer un modèle climatique à l'aide d'une nouvelle invention, l'ordinateur. Il conclut de ce travail de pionnier que les variations de la concentration de CO2 atmosphérique peuvent expliquer les changements climatiques observés par le passé, en particulier les phases de glaciation et de déglaciation mise en évidence par Agassiz.

S'intéressant aussi à l'avenir, il prédit qu'avec le niveau d'émissions des années 50, la concentration de CO2 atmosphérique devrait augmenter de 30% par rapport au niveau préindustriel d'ici l'an 2000. En conséquence, il estime qu'un réchauffement moyen de la Terre de 1,1°C devrait être observé à la même date (en réalité, ce réchauffement sera de 0,6°C).

Le spleen de l'après-guerre?

Est-ce l'influence de la seconde guerre mondiale et en particulier du drame de Hiroshima, qui a contribué à ébranler la foi collective dans le progrès? Toujours est-il que Gilbert Plass envisage les conséquences d'un réchauffement climatique avec nettement moins d'optimisme que ses prédécesseurs. Convaincu que les hommes brûleront l'intégralité des ressources fossiles qui leur tomberont sous la main (pour l'instant, il faut bien reconnaitre que les évènements lui donnent raison), Plass observe que "l'accumulation de dioxide de carbone dans l'atmosphère est un problème très sérieux à l'échelle de quelques siècles."

Sérieux, le problème l'est effectivement devenu. Et en bien moins de temps que ce que Plass imaginait.

Première partie (19ème siècle) : Petite histoire de l'effet de serre (1)
Troisième partie (l'après 1955) : Petite histoire de l'effet de serre (3)

Données historiques : Thin Ice de Mark Bowen
Photo 1 : http://en.wikipedia.org/wiki/Infrared
Photo 2 : Le physicien américain Gilbert Plass, http://photos.aip.org/history/Thumbnails/plass_gilbert_a1.jpg

lundi 16 juillet 2007

Infatigable Al Gore

Décidément, on ne l'arrête plus! L'émotion médiatique suscitée par la série de concerts Live Earth est à peine retombée qu'Al Gore annonce le lancement d'un concours de publicité.

Le concours consiste à produire un spot de 15, 30 ou 60 secondes expliquant le phénomène du réchauffement climatique et incitant à demander une action pour le résoudre. Selon les informations exclusives du New York Times, il s'adresse à toute personne ayant des talents particuliers avec une caméra ou un logiciel de production de film (ne vous réjouissez pas trop vite, cette description nébuleuse inclut aussi les agences de publicité...). Les 20 meilleurs spots seront sélectionnés par une équipe très glamour qui inclut entre autres Cameron Diaz, Orlando Blum et Georges Clooney... Les détails du concours sont .

Avec cette action, Al Gore révèle une nouvelle facette de sa personnalité : son sens de l'humour caché. Le gagnant de ce grand projet se verra en effet offrir un magnifique véhicule utilitaire Toyota Highlander hybride (j'imagine que tout est dans la nuance), qui lui offrira l'oportunité rare de parcourir s'il le souhaite les vastes avenues de New York City... à plus de plus de 9 litres aux 100 km.

vendredi 13 juillet 2007

The new climate awareness of America

They are unanimous : during the last 18 months, the United States have been experiencing a rising interest in the global warming issue. From coast to coast, all the people I have so far been talking to have perceived the unprecedented "climate revolution".

A new awareness that finally buries the scientific debate

Recent polls confirm this rise of awareness. According to the Pew Research Center, 38% of the Americans now rank the global warming issue as a top priority, a number 14% higher than in 2002. Although the problem is still not seen as an emergency by the majority of the American population, it seems at least that the long-lived scientific debate is finally over : in January 2007, 77% of the Americans thought that climate change was indeed real, an increase of 7% since June 2006.

The impact of a hurricane...

But what did trigger this change of public opinion? It seems that causes are numerous. According to Annie Strickler, communication director of ICLEI USA, an association that helps local governments implement measures to reduce their emissions, the recent climate awareness started with the hurricane Katrina. However, local climatic events (drought, lack of snow) and the recent Democrat majority in Congress also made a deep impression on people.

... and a movie

For many Americans, Al Gore's famous documentary An Inconvenient Truth also plaid an important role in the public opinion reversal. "With his movie, Al Gore managed to turn the public's attention to a very complex issue", says Dr. Stephen Nodvin. Thus, the climate change problem became a matter of interest for other people than the traditional intellectual elite who had been familiar with the subject for years. And as a proof of its success, Al Gore recently demonstrated again the power of the entertaining formula by organizing the Live Earth concerts series.

Nevertheless, according to Anthony Leiserowitz, director of the Yale project on climate change, who was recently interviewed by the National Public Radio during its Climate Connections series, Gore's impact on public opinion is probably overestimated. In his opinion, people who actually watched and liked the movie were often Democrats, traditionally more aware of environmental issues. Katrina's impact was probably more determining.

A new scandal story full of economic opportunities

Finally, according to the science journalist Chris Mooney, who had a thorough look into the question, public attention was also caught by the impressive rise of media interest displayed since Katrina's disaster. Mooney indicates that not only did the coverage of the issue increase dramatically, but the subject has also been entirely reframed.

While global warming was for a long time only discussed on the so-called scientific debate point of view, it suddenly became scandalous subject. As journalists were telling the stories of the various scandals related to the Iraq war, they unfortunately discovered the intimidation methods and the scientific information distortion that were used by the Bush administration. All this clumsiness made the uncertainty thesis more difficult to sell and journalists started writing about personal stories and big economic opportunities.

A long-lasting impact?

In a world where information ought to follow an ever faster pace, can such an interest last? For Anthony Leiserowitz, this is not certain. It is then even more necessary to use this opportunity window to implement courageous national policies.

Version française : Le grand réveil de la conscience américaine

Caricature 1: http://www.brutallyhonest.org/brutally_honest/images/2007/03/15/051206winterblunderx.gif
Caricature 2: Dan Perjovschi, What Happened to US?, MOMA exhibition

jeudi 12 juillet 2007

Le grand réveil de la conscience américaine


Ils sont unanimes : depuis environ 18 mois, les Etats-Unis connaissent un fantastique renversement d'opinions sur la question du changement climatique. De la côte est à la côte ouest, la "révolution climatique" a été perçue par toutes les personnes avec qui je me suis entretenu jusqu'à présent.

Une prise de conscience qui enterre (enfin!) le supposé débat scientifique

Les sondages effectués ces derniers mois confirment cette tendance. D'après le Pew Research Center, 38% des Américains considèrent aujourd'hui le changement climatique comme une priorité absolue, soit 14% de plus qu'en 2002. Si le problème n'est pas encore considéré comme une urgence par la majorité de la population, le débat scientifique sur le sujet est bel et bien enterré : en janvier 2007, 77% des Américains pensaient que le réchauffement climatique était réel, soit presque 10% de plus qu'en juin 2006.

L'impact d'un ouragan...

Les causes de ce changement d'opinions? Elles semblent être multiples. Pour Annie Strickler, directrice de la communication d'ICLEI USA, une association qui aide les gouvernements locaux à mettre en place des mesures de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre, la prise de conscience climatique a débuté avec l'ouragan Katrina qui a si durement frappé la Nouvelle Orléans en 2005. La catastrophe n'est toutefois pas la seule cause de la nouvelle sensiblité américaine : les évènements climatiques locaux (manque de neige, sécheresse), ainsi que la nouvelle majorité Démocrate jouent également un rôle dans la prise de conscience collective.

... et d'un documentaire

Pour beaucoup d'Américains, le film-sensation d'Al Gore a également une part de responsabilité. Comme le fait remarquer le Dr. Stephen Nodvin, "Gore est parvenu grâce à son film à attirer l'attention d'un public de plus en plus difficile à intéresser." An Inconvenient Truth aurait ainsi permis de sortir la question climatique des cercles intellectuels où elle était traditionnellement confinée pour en faire une préoccupation de M. Tout le Monde. Prouvant qu'il a fait sienne la maxime selon laquelle l'on ne change pas une formule qui gagne, Gore vient d'ailleurs de renouveller sa recette du divertissement grand public avec la soirée de concerts mondiaux Live Earth du 7 juillet (bien que je constate que "le monde" concerné se concentre quand même un peu toujours sur les mêmes : sur 8 concerts, 4 ont eu lieu dans des villes anglophones...)

Selon Anthony Leiserowitz, directeur du projet sur le changement climatique de la (très) prestigieuse université de Yale et interviewé récemment par la National Public Radio dans le cadre de sa série Climate Connections, l'impact de l'action de Gore est toutefois surestimé. Selon lui, les gens qui ont aimé (et qui sont allés voir) son film sont des Démocrates, traditionnellement déjà sensibilisés à la question. Pour lui, l'impact de Katrina sur l'imaginaire collectif est nettement plus important.

Un sujet à scandales qui regorge d'opportunités économiques

Enfin, selon le journaliste scientifique Chris Mooney, qui s'est longuement penché sur la question, l'attention du public a aussi été attirée par une forte hausse de l'intérêt des médias pour le phénomène, en bonne partie suite à l'ouragan Katrina. Mooney cite non seulement une augmentation considérable de la couverture médiatique sur le sujet depuis quelques mois (ce que n'importe quelle personne consultant régulièrement des journaux américains pourra confirmer sans difficulté), mais également un changement substantiel de l'angle sous lequel il est traité.

Le changement climatique, longtemps uniquement abordé sous l'angle du supposé débat scientifique, est en effet devenu un sujet à scandales. Alors que les journalistes déterraient un à un les divers mensonges de l'administration Bush dans le cadre de la guerre en Irak, ils ont également (bien mal à propos) mis le doigt sur les tentatives d'intimidation des scientifiques et de dissimulation des faits pratiquées par le gouvernement... Face à toutes ces maladresses, la grande thèse de l'incertitude face au changement climatique a perdu quelque peu de son éclat. Les médias ont donc préféré s'emparer des petites histoires et des grandes opportunités économiques dont le sujet regorge.

Un intérêt passager ?

Dans un monde où l'information est instantanée, un tel engouement peut-il toutefois durer? Selon Anthony Leiserowitz, rien n'est moins sûr. Il est donc plus que temps de profiter de cette période de grâce pour mettre en place des politiques nationales courageuses...

English Version: The new climate awareness of America

Photo 1 : http://images.businessweek.com/ss/07/03/0329_pupilpower_timeline/source/8.htm
Photo 2: http://images.businessweek.com/mz/04/33/0433covdc.gif

mardi 10 juillet 2007

Biocarburants : le miracle du biodiesel?

La grande séduction des biocarburants

Ils sont à la mode et le public y croit (1) : grâce à eux, les grands problèmes américains de dépendance énergétique et de changement climatique vont enfin trouver un début de solution. En cette période de grande réflexion nationale sur les alternatives possibles au pétrole, l'avenir s'annonce rose pour les biocarburants.

Les premiers à s'en féliciter sont bien évidemment les producteurs de maïs américains. Selon l'American Coalition for Ethanol, ils ont fourni en 2006 la presque totalité des 5 milliards de gallons (3) d'éthanol (2) produits nationalement, une quantité qui a permis d'assurer la vente d'un mélange essence-éthanol dans 46% des stations services américaines.

Biodiesel : côté clair...

Mais malgré sa suprématie incontestable, l'éthanol n'est pas la seule forme de biocarburants qui bénéficie actuellement d'une conjoncture extrêmement favorable. D'après la National Biodiesel Board, les biodiesels (biocarburants faits à partir d'huile végétale) ont également le vent en poupe : leur production n'atteignait certes qu'un modeste 250 millions de gallons l'année dernière, mais elle a tout de même été multipliée par 10 entre 2004 et 2006 sous l'effet d'une subvention fédérale de 1$ pour tout gallon de biodiesel mélangé au diesel américain!

Si j'en crois un article publié début juin dans la prestigieuse revue scientifique Proceedings of the National Academy of Sciences, la générosité de cette subvention _ le double de celle obtenue pour la production d'un gallon d'éthanol _ est plutôt bien pensée, car les biodiesels présentent des avantages comparatifs élevés par rapport à l'éthanol. Alors que l'éthanol offre par exemple un gain d'énergie de 25% par rapport à celle investie initialement dans sa production, le gain énergétique des biodiesels est de 93%. Par ailleurs, les cultures utilisées pour la production de biodiesels (aux Etats-Unis, il s'agit en général de soja) nécessitent le relâchage d'une quantité nettement inférieure de pesticides et d'engrais dans l'environnement.

... et côté obscur

Les biodiesels seraient-ils donc l'alternative idéale au pétrole? Pas vraiment. Pour commencer, ils ne sont pas plus que l'éthanol capables de remplacer les carburants fossiles. Qu'on en juge : si l'ensemble du maïs et du soja américains étaient utilisés uniquement pour produire des biocarburants (ce qui implique malheureusement que tous les Américains deviennent végétariens, hypothèse plutôt improbable), ils ne fourniraient que 12% des besoins actuels en essence et que 6% des besoins en diesel. Sachant que lesdits besoins augmentent chaque année, on comprendra facilement que l'on est plutôt loin du compte...

Un récent article du Christian Science Monitor met par ailleurs en lumière une conséquence imprévue de la généreuse subvention accordée par le gouvernement fédéral. L'histoire commence à l'automne 2006, avec un commerçant lambda spécialisé dans le négoce des biocarburants. Parfaitement à l'aise avec les cours mondiaux de ces produits, il décide d'importer de Malaisie une cargaison de 9 millions de gallons de biodiesel, produits à partir de l'huile de palme (elle même produite au détriment des dernières forêts tropicales de la région). La cargaison est envoyée à Houston, Texas, où après avoir été mélangée à 9 000 gallons de pétrodiesel, elle devient éligible pour la subvention fédérale. Le commerçant empoche donc 9 millions de dollars pour son opération. Mais le gain peut encore être augmenté avec un peu d'astuce : au lieu de vendre le mélange obtenu sur le marché américain, notre commerçant (pas si bête, décidément) choisit de profiter des prix plus élevés offerts par le marché européen et envoie l'ensemble de sa cargaison à Rotterdam. Et voilà comment une cargaison de biodiesel tropical se retrouve dispersée dans les stations-services européennes, grâce à l'argent du contribuable américain...

Entre pressions agricoles et environnementales

D'après le Christian Science Monitor, cette pratique reste encore marginale, mais risque de faire beaucoup d'émules si rien n'est fait pour y remédier. Ce n'est pas le lobby agricole qui y poussera, car il bénéficie grâce à ce système d'un intéressant avantage compétitif sur le marché international. Il reste donc à souhaiter que le pouvoir législatif saura réaliser à temps que la généralisation d'une telle pratique annule passablement le bénéfice environnemental de cette alternative, qui si elle n'est pas miraculeuse, n'en reste pas moins intéressante.

(1) Selon un sondage réalisé en janvier 2007 par l'United Press International, la majorité des Américains pensent que les biocarburants sont les remplaçants les plus probables des carburants fossiles.
(2) Ethanol : biocarburant produit à partir de sucre ou d'amidon.
(3) C'est peu pratique, mais il faut faire avec : les Américains ne fonctionnent toujours pas avec le système métrique. Je m'excuse donc de vous annoncer qu'un gallon représente 3,785 litres (moins quelques décimales)...

Sources :
J. Hill et al. Environmental, economic and energetic costs and benefits of biodiesel and ethanol biofuels. Proceedings of the National Academy of Sciences, June 2, 2007.
Photo : http://www.dervaesinstitute.org/presskit/pressphotos/biodiesel.jpg

jeudi 5 juillet 2007

Petite histoire de l'effet de serre (1)

A force d'entendre des débats contradictoires sur la réalité du réchauffement climatique, on finit presque par en oublier que le phénomène de l'effet de serre est étudié depuis plus de cent ans par les scientifiques et que la possibilité d'un impact humain sur le climat était déjà évoquée à la fin du 19ème siècle. Historique...

L'intuition de Fourier

C'est Joseph Fourier, mathématicien et physicien français (et également préfet de l'Isère _on le saura!) qui émet le premier en 1824 l'hypothèse que la "chaleur obscure" émise par la Terre rencontre plus de résistance lors de sa traversée de l'atmosphère que la chaleur lumineuse émise par le Soleil. En conséquence, la Terre aurait tendance à accumuler de la chaleur. Le raisonnement, bien que prometteur, se heurte cependant à l'imprécision des connaissances de l'époque sur la lumière et Fourier admet être incapable de fournir un modèle mathématique pour expliquer son intuition.

De l'alpinisme à l'effet de serre

Ce n'est qu'une trentaine d'années plus tard que son hypothèse sera étudiée plus en détail par un jeune physicien irlandais passionné de montagnes, John Tyndall.

Tyndall attrape probablement le virus de l'alpinisme lors d'une visite de la Suisse en 1856. Dans les années qui suivront, il fera trois fois l'ascension du Mont Blanc et passera même une nuit au sommet avec une vingtaine de thermomètres (qui ne résisteront pas à l'expérience). Il fera ensuite en 1858 l'ascension en solitaire du Mont Rose (4634 m), et gravira le Weisshorn (4506 m) en 1861 et le Mont Cervin (4478 m) en 1865.

Son amour de la montagne l'amènera tout naturellement à s'intéresser à la météorologie. En 1859, il présente ainsi devant la Royal Society les résultats d'une expérience qui montrent que la "lumière obscure" (les rayonnements infrarouges modernes) est absorbée de façon variée par les différents gaz atmosphériques. Tyndall observe que la vapeur d'eau est le gaz à effet de serre le plus puissant et place en seconde position le dioxide de carbone (C02). Fort de ces observations, il suggère que les périodes de glaciation mises en évidence par le zoologiste suisse Louis Agassiz dans les années 1830 sont liées à des variations dans les concentrations atmosphériques de ces deux composés. Son intuition tombe plutôt juste : on pense aujourd'hui que les phases de glaciation et de déglaciation du Pléiostène sont effectivement liées à des variations des concentrations atmosphériques de la vapeur d'eau et du CO2, même si l'on s'interroge encore sur le phénomène qui a déclenché ces variations.

Tyndall meurt brusquement en 1893, lorsque sa jeune femme lui donne par erreur de l'hydrate de chloral à la place d'une cuillère à thé de magnésium. Au moment de cette tragédie, les connaissances accumulées dans le domaine de la thermodynamique ouvrent la voie au travail d'un chimiste suèdois, Svante Arrhenius, auteur de la première théorie complète sur l'effet de serre.

Les prédictions d'Arrhenius

Arrhenius est depuis toujours passionné par les mathématiques. Fils d'un géomètre de la région d'Uppsala, il apprend à lire par ses propres moyens à l'âge de 3 ans et s'intéresse très jeune à l'arithmétique, qu'il découvre en regardant son père effectuer des additions. Cet intérêt se retrouve dans le traité de 29 pages sur l'effet de serre, qu'il présente en 1896 au London, Edinburgh and Dublin Philosophical Magazine, et dans lequel il reprend 10 000 à 100 000 calculs qu'il a effectués. Dans l''une des sections de son traité, intitulée Calcul de la Variation de Température qui suivrait une Variation donnée du Dioxide de Carbone de l'Air, Arrhenius estime que le réchauffement climatique moyen qui serait obtenu dans le cas d'un doublement de la concentration de CO2 dans l'atmosphère serait de l'ordre de 5 à 6°C. Rétrospectivement, cette estimation est remarquablement proche des prédictions actuelles, qui sont plutôt de l'ordre de 2 à 4,5°C.

Dans un premier temps, Arrhenius porte la responsabilité potentielle des éventuelles variations de la concentration en CO2 sur les éruptions volcaniques. Mais face à la quantité toujours croissante de charbon brûlé par les premières usines de la Révolution Industrielle, il émet en 1903 l'hypothèse que les activités humaines pourraient elles-aussi influencer la concentration atmosphérique de CO2. "Au rythme actuel, écrit-il, il faudra environ 3000 ans pour doubler le niveau de CO2 atmosphérique". Cette fois, Arrhenius se trompe lourdement. Au rythme que nous connaissons aujourd'hui, nous devrions en fait atteindre ce doublement au cours du 21ème siècle, soit moins de 200 ans après les prédictions du chimiste suèdois.

La suite de la saga, de 1903 à 1955 : Petite histoire de l'effet de serre (2)

Sources :

Données historiques : Thin Ice, de Mark Bowen
Photo 1 : Joseph Fourier (désolée pour sa tête applatie) http://physics.mtsu.edu/~wmr/fourier.jpeg
Photo 2 : vous l'avez reconnu, c'est bien sûr John Tyndall
http://www.timbercon.com/History-of-Fiber-Optics/John-Tyndall-Physicist-Big.jpg
Photo 3 : Svante Arrhenius, prix Nobel de Chimie http://www.su.se/content/1/c4/35/74/Arrhenius-1903webb.jpg