mercredi 26 mai 2010

Les faiblesses cachées de Kyoto

-1,5% en 2007, -1,9% en 2008, -8,5% en 2009.... Au Royaume-Uni, les émissions nationales de gaz à effet de serre se réduisent comme peau de chagrin. Selon les estimations provisoires du Ministère de l'Energie et du Changement Climatique, le pays est parvenu en 2009 à ramener ses émissions annuelles à 575 millions de tonnes équivalents CO2, ce qui représente une chute de plus de 25% des émissions par rapport au niveau de 1990. Ce résultat dépasse largement l'objectif de -12,5% par rapport à 1990 fixé dans le cadre du protocole de Kyoto et le Royaume-Uni fait donc figure de bon élève dans la cour européenne.

Le maillon faible du protocole
Pourtant, les choses ne sont pas aussi roses qu'elles le paraissent à première vue. Si j'en crois les résultats d'une analyse publiée en janvier 2010 dans le journal scientifique Environmental Science and Technology, le bilan britannique est surtout emblématique de l'un des grands paradoxes du protocole de Kyoto. Certes, entre 1990 et 2004 (la période couverte par l'étude), l'économie britannique s'est décarbonée, notamment grâce à la transition vers une économie plus axée sur les services et qui privilégie l'utilisation du gaz naturel à celle du charbon. Mais cette transition n'a pas impacté à la baisse les habitudes de consommation des Britanniques, qui ont continué à acheter des biens manufacturés. Les biens en question ont simplement eu tendance à être de moins en moins souvent fabriqués au Royaume-Uni et de plus en plus souvent importés de pays non soumis à des obligations de réductions d'émissions dans le cadre du protocole de Kyoto. En tenant compte de ce flux grandissant d'importations, il apparait qu'entre 1990 et 2004, le Royaume-Uni a en réalité vu ses émissions de gaz à effet de serre enfler d'environ 9%, ce qui est fort éloigné de l'objectif fixé par le protocole international.

Bien que cette analyse n'ait pas été réalisée de manière détaillée pour l'ensemble des pays de l'Union Européenne, le cas du Royaume-Uni peut sans doute être comparé à l'arbre qui cache la forêt. A l'heure où les débats internationaux concernant l'après Kyoto font rage, il serait par conséquent de bon ton de réaliser qu'il y a peut-être quelque chose de pourri dans ce protocole...

dimanche 9 mai 2010

Les nuages tu ensemenceras

Dans un premier temps, on pourrait presque croire à une publicité pour dentifrice : John Latham et Stephen Salter proposent de blanchir les nuages. Les deux compères ne sont pourtant pas des as du marketing, mais bien des scientifiques, l'un chercheur au Centre National de Recherche Atmosphérique de Boulder, dans le Colorado aux Etats-Unis et l'autre professeur au département d'ingénierie de l'Université d'Édimbourg en Écosse.


Small is whiter
L'idée qu'ils défendent ne date pas d'hier ; elle a fait l'objet d'une publication de John Latham dans la très prestigieuse revue Nature en 1990. Le concept général en est simple : les nuages sont formés de vapeur d'eau, qui se condense en gouttelettes autour de fines particules solides, appelées "noyaux de condensation". Faisant sienne la devise "égalité", la vapeur d'eau tend à se condenser sur chaque noyau. Dans un nuage riche en noyaux et à quantité de vapeur d'eau égale, les gouttelettes auront donc tendance à être plus petites. Or, à masse égale, plus les gouttelettes d'un nuage sont petites, plus le nuage est blanc et plus il réfléchit les rayons solaires ; il a un albédo plus élevé.

Bonnet d'âne pour les stratocumulus
Dans cette course à l'albédo, les stratocumulus, qui recouvrent 25% à 30% de la surface océanique, notamment dans les régions subtropicales, font souvent figure de cancres. Nuages de basse altitude, ils passent en effet fréquemment leur vie en mer. Or, un nuage est plus riche en noyaux de condensation s'il traverse des terres, où il pourra se charger en poussière et autres résidus volatiles. Face à ce problème existe une solution (relativement) simple : il "suffit" d'ensemencer ces nuages en particules, ce qui permettra d'augmenter leur albédo et nous offrira un répit pouvant peut-être aller jusqu'à 25 ans !

Des vertus cachées du sel de mer
Pour ce faire, Latham et Salter proposent de mettre en place une flotte de machines qui fonctionneraient à l'énergie éolienne et pomperaient l'eau de mer pour la rejeter dans l'atmosphère sous forme de très fines gouttelettes. Ces gouttelettes contiendraient des cristaux de sel, qui joueraient le rôle de noyaux de condensation. Bien sûr, comme les cristaux de sel auraient tendance à retomber rapidement sous forme de pluie, l'effet réfléchissant ne serait que temporaire et son maintien nécessiterait un travail constant des machines. Néanmoins, la méthode présenterait l'avantage d'être flexible (on pourrait moduler le travail des machines à distance et déplacer la flotte en fonction de l'emplacement des nuages) et d'être basée sur des éléments non-polluants, puisqu'il s'agit d'eau de mer et de vent. Par ailleurs, les effets de cette activité pourraient se dissiper très rapidement en cas de problème imprévu.

Tous les chercheurs ne sont toutefois pas aussi enthousiastes que Latham et Salter. Selon une équipe de scientifiques du MetOffice qui s'est penchée sur la question, l'opération pourrait notamment se solder par une forte réduction des pluies au dessus de l'Amérique du sud... ce qui reviendrait à accélérer l'agonie de la forêt amazonienne.

Le débat reste donc ouvert. Mais pour combien de temps ?

Image : ciel des Alpes, vu par Sophie

mardi 4 mai 2010

Publication externe d'un article du grand dégel

Il n'est pas trop tard pour vous le dire : un article du grand dégel a fait l'objet d'une publication exceptionnelle dans le Recherché, le journal de l'association des étudiants aux cycles supérieurs de Polytechnique Montréal.

Vous pouvez trouver l'article sous le lien suivant : Le Recherché de septembre 2008.

dimanche 2 mai 2010

Meteorology and climatology: two different worlds


This might come as no surprise to the numerous tourists strolling around the surroundings of the French Riviera: Marseille (the third most populous metropolitan area of France) enjoys a Mediterranean climate. In addition to a significant number of British citizens moving to the area in the wake of Peter Mayle, this means that the summers in the city are usually hot, while autumns and winters are mild. Most rainfall is recorded during the autumn and winter season.

On the other side of the Atlantic Ocean, and despite close latitude, Montreal is characterized by a continental climate. This means that winters are cold (some might even say very cold), while summers are hot. Precipitations are recorded the year round.

Now prepare yourself for a shock: on January 9, 2009, it snowed in Marseille; it might also have been the case in Montreal, but for some odd reason, it dit not end up making the cover of newspapers (I had a look to make sure). This snow event is of course very interesting, but I think you may easily conclude with me that this does not modify the first piece of information of this post: Marseille is and remains to this day a Mediterranean city. Even if we assume, just for the sake of argument, that on January 9, 2009, it snowed in both Montreal and Marseille, it will not lead us to deduce that Marseille is going through some strange climate change event that would make its climate closer to the Canadian one. For this to be the case, it would have to snow for numerous consecutive winters, the average temperatures recorded at Marseille's airport would have to plummet in both winter and summer and holly oaks would have to be replaced by maples. Of course, none of these changes would take place within a fortnight or even a ten-year period. Thus we would not be certain of a climate change before very long years had passed.

One swallow does not a summer make
It follows from the example above that no single weather event can by itself define a given climate. This is of course all the more true for a changing climate. It is not because it snowed in Marseille in January 2009 that the climate of the city is cooling. Similarly, it is not because the hurricane Katrina wreaked havoc in New Orleans that it proves the world climate is changing.

On the other hand, it is because scientists have been recording for years a rise of average temperatures in the weather stations of the planet that we have the certainty that something is happening with climate. When this kind of things happen, events such as Katrina become more likely, while snow in Marseille becomes less frequent. But this does not mean it cannot happen. January 9, 2009 made this point clear.

Image: Marseille, seen by Sophie

Version française : Climat, météo, késako ?