dimanche 7 février 2010

... n'y a t'il vraiment plus d'espoir ? (2)

Pour ceux qui n'auraient pas suivi
Dans Noir c'est noir... nous avons vu que les émissions moyennes d'un Français étaient 4 fois supérieures à ce qu'elles devraient être selon le rapport 2007 du GIEC. Face à ce constat, ... n'y a t'il vraiment plus d'espoir ? (1) nous a donné des solutions pour réduire nos émissions individuelles de 25% à travers des actions sur les postes transport et logement. Mais des économies sont également possibles sur d'autres postes! Suivons le guide*...

* dans un souci de clarté et pour faciliter les comparaisons, les calculs décrits ci-dessous ont tous été effectués via le bilan carbone personnel de l'ADEME.

Alimentation (19%)

4. Ce n'est pas politiquement correct, mais ça n'en correspond pas moins à une réalité : la consommation quotidienne de protéines animales a un impact significatif sur la santé et sur l'environnement. Entendons nous bien : je ne prône pas le régime végétarien. Mais entre le régime végétarien et le régime actuel d'un Européen ou d'un Américain (1,6 kg de viande par semaine en Europe et 2,4 kg de viande par semaine aux Etats-Unis selon la FAO), il y a tout de même une marge de manœuvre! Le régime carné actuel d'un Français implique l'émission de 300 kg eq. C par an. Si ce même Français suivait les recommandations du Fonds Mondial de Recherche contre le Cancer, qui incite à limiter sa consommation de viande de boucherie (bœuf, agneau, porc) à 500 g de viande cuite par semaine — soit presque deux fois moins que la moyenne actuelle — et gardait par ailleurs une consommation moyenne de volaille et de poisson (environ 1 kg par semaine au total), ses émissions se réduiraient à 200 kg eq. C par an.

5. Ça n'a l'air de rien, mais boire l'eau du robinet plutôt que de l'eau en bouteille fait économiser 66 kg eq. C par an.

6. Il est évidemment beaucoup plus facile de contrôler son alimentation en cuisinant soi-même. Les plats préparés sont donc à éviter.

7. Les mangues, les tomates et les fraises sur les étalages au mois de janvier sont très tentantes. Malheureusement, leur consommation est responsable de 22 kg eq. C émis en moyenne par Français. En ne consommant que des produits de saison locaux (ce qui augmente grandement la diversité de l'alimentation au jour le jour et le plaisir des repas), les émissions liées à la consommation de fruits et légumes peuvent être réduites de 75%.

8. Malgré leur côté pratique, les hypermarchés et supermarchés de périphérie ne sont pas la panacée pour qui souhaite réduire ses émissions. Il semblerait en effet que faire ses courses dans ce type de commerce entraîne l'émission d'environ deux fois plus de gaz à effet de serre que le fait de les faire dans les commerces de proximité : les urbanistes vous diront que c'est logique, dans la mesure où il est difficile de se passer de sa voiture quand on va dans un hypermarché. Favoriser le commerce de proximité peut également avoir un avantage caché : le choix étant moins large, le consommateur achète peut-être moins, ce qui pourrait aider à réduire le pourcentage de nourriture jetée chaque année — qui atteint actuellement le chiffre scandaleux de 30 à 40% dans les pays développés.

Bilan : en limitant sa consommation de viande de boucherie à 500 g par semaine et par personne, en ne buvant que l'eau du robinet et en n'achetant que des fruits et des légumes de saison, on peut potentiellement réduire ses émissions de 200 kg/an. Sur un total d'environ 500 kg/an en moyenne, ce n'est quand même pas négligeable!

Consommation de biens manufacturés (20%)
Sur la base de ses dépenses moyennes en biens manufacturés (ordinateurs, téléphone, vêtements et chaussures, produits de beauté, ect...), un Français émet environ 600 kg d'eq. C par an. Il n'est pas évident de dire quel est le potentiel de réduction sur ce poste. Toutefois, deux règles de base peuvent contribuer à une baisse significative des émissions :

9. Limiter l'exposition à la publicité , notamment pour les enfants et les adolescents. Ceci implique un usage restreint du principal vecteur de publicité dans les foyers : la télévision.

9. Préférer l'achat de produits de qualité à l'achat de produits peu chers, mais de qualité médiocre. D'une part, ceci permet de garder les produits achetés plus longtemps. D'autre part, ceci revient souvent à encourager une production locale plutôt qu'une production importée. En particulier, il est intéressant d'éviter autant que possible l'achat de produits chinois, car si la Chine n'est pas responsable du changement climatique observé jusqu'à présent, elle n'en est pas moins aujourd'hui le plus gros émetteur de gaz à effet de serre. De plus, l'efficacité énergétique de ses usines laisse encore énormément à désirer par rapport aux pays développés, comme l'illustre le graphe ci-dessous.

Bilan : l'application de ces dix mesures permet de réduire environ par deux le niveau d'émissions individuelles d'un Français. Elles représentent donc un pas important dans la direction recommandée par le GIEC. Ces astuces impliquent un changement significatif des habitudes de consommation individuelles. Toutefois, significatif ne veut pas dire insurmontable. La plupart de ces mesures sont en effet applicables au quotidien sans difficulté majeure - la restriction de l'usage de la voiture est à mon sens l'exception qui confirme la règle. Quel que soit le niveau de difficulté de ces mesures pour chacun, leur énumération permet de prendre conscience du décalage existant entre les efforts réellement nécessaires pour limiter l'impact du réchauffement climatique et l'image que se fait la société de l'effort à fournir ; malheureusement, il ne suffit pas de mettre des ampoules basse-consommation chez soi, d'acheter des avocats bio du Pérou et de trier ses déchets pour compenser le mode de vie occidental. Le problème est autrement plus vaste.

Image : Barcelone, vue par Marie Metge

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