Les élections américaines approchent à grands pas. Vu d'Europe, le débat présidentiel semble focalisé sur l'économie. Pourtant, les deux candidats ont aussi émis des opinions fortes sur la question du climat. Regards croisés sur une question qui a fait couler beaucoup l'encre ces derniers mois...
Le retour en grâce de la question climatique
Le vent a en effet tourné aux Etats Unis. Après des années de déni et de désinformation par l'administration Bush, l'heure semble être enfin au réalisme : pour John McCain comme pour Barack Obama, le changement climatique est un problème réel qui nécessite une action urgente. au niveau national et international. Reste à savoir laquelle!
La bourse du carbone a le vent en poupe
A l'exemple de l'Union Européenne, les deux candidats ont déclaré qu'ils privilégieraient une bourse du carbone à une taxe carbone. Ceci revient à dire qu'ils envisagent de limiter les émissions de gas à effet de serre des entreprises sans s'attaquer à la question délicate des particuliers. Par ailleurs, leurs objectifs de réduction des émissions sont sensiblement équivalents : malgré quelques divergences sur le long terme - à l'horizon 2050, McCain envisage théoriquement une réduction des émissions de 60% par rapport à 1990 alors qu'Obama affiche un objectif de 80% - les deux candidats souhaitent avant tout ramener les émissions de 2020 au niveau de 1990. Sachant qu'en 2005, les émissions américaines étaient 16% plus élevées qu'en 1990, cet objectif représenterait déjà un réel effort. Il reste toutefois bien inférieur à l'objectif européen, qui consisterait à diminuer les émissions d'au moins 20% par rapport au niveau de 1990 d'ici 2020.
Pétrole et indépendance énergétique : un cocktail explosif ...
Le flirt récent du baril de pétrole avec les 150$ a plus que jamais remis la délicate question de l'indépendance énergétique au goût du jour. La question est politiquement très délicate, et a obligé McCain à changer son fusil d'épaule. Après avoir voté régulièrement contre le forage de puits pétroliers dans l'Artic National Wildlife Refuge (ANWR, une immense zone protégée le long de la mer de Baufort), le candidat républicain a déclaré dernièrement qu'il était favorable à ce projet, ce qui ne peut qu'agréer à sa colistière, Sarah Palin. Prudent cependant (il sait sans doute que ce projet ne permettra pas de dégager de pétrole avant plusieurs années, que les réserves qu'on prette à l'ANWR sont hypothétiques et que même si elles s'avèrent aussi importantes que prévues, elles ne réprésentent qu'une goutte d'eau dans la consommation américaine), il envisage également un investissement massif dans le nucléaire - 45 centrales construites d'ici 2030 - ainsi que la promotion du charbon propre et des technologies innovantes. Les énergies solaire et éolienne le laissent en revanche dubitatif ; selon ses dires, elles sont "à 10 ans d'être utilisables".
... qui oblige à quelques contorsions
De son côté, Obama soutient une diminution aussi rapide que possible de la dépendance américaine au pétrole. Probablement conscient que la chose présente quelques difficultés, il préconise l'économie énergétique sous la forme d'une limitation de la consommation des véhicules ainsi que la promotion des énergies renouvelables, du nucléaire et du charbon propre. Sa position sur la question des forages pétroliers est assez ambigüe : le parti démocrate étant historiquement opposé au forage dans l'ANWR, il dispose sur cet aspect de peu de marge de manœuvre. Il a en revanche annoncé qu'il soutenait le forage offshore le long des côtes des Carolines et dans le golfe du Texas.
La fin de l'isolationnisme américain?
Pour les deux candidats, les Etats-Unis se doivent de reprendre leur place dans le débat international sur la question climatique. Alors qu'Obama envisage d'entraîner son pays dans le débat post-Kyoto, McCain se place dans la droite ligne républicaine et a déclaré qu'il ne souscrirait pas à un accord international contraignant si celui-ci n'incluait pas la Chine et l'Inde.
Alors, pro-républicain ou pro-démocrate? This is now the question...
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lundi 20 octobre 2008
mardi 27 mai 2008
Inconvenant ours polaire
Un classement préoccupant
Ces derniers temps, Sarah Palin, gouverneur républicaine de l'Etat d'Alaska, voit les ours polaires d'un mauvais oeil. Ces derniers ne viennent-ils pas d'être classés de façon fort inopportune sur la liste des espèces menacées des Etats-Unis ? La nouvelle n'augure rien de bon pour les plantigrades. Mais pour Mme Palin, elle n'augure surtout rien de bon pour l'économie de l'Alaska. L'ours polaire classé, ce sont les côtes nord et nord-ouest de l'état qui risquent de devenir inaccessibles à l'exploitation pétrolière et gazéifère... et des millions de dollars d'investissement qui risquent de s'envoler en fumée.
La pilule est d'autant plus dure à avaler que la population d'ours polaires de l'Alaska est aujourd'hui florissante ; comment imaginer dans ces conditions qu'elle puisse totalement disparaître d'ici 2050, ainsi que le prédisent certains scientifiques ?
Indissociable alliance
Pourtant, les faits semblent donner raison à ces cassandres : si l'ours polaire se porte encore bien, la glace arctique dont sa survie dépend se porte, elle, plutôt mal. Au rythme actuel, l'Arctique pourrait être totalement dégelé en été vers le milieu du 21ème siècle selon Environnement Canada. Les investisseurs se frotteront sans doute les mains à cette nouvelle, qui offre des opportunités économiques inédites (transport maritime plus rapide, exploitation de gisement pétrolifère inaccessibles actuellement). Pour les ours polaires toutefois, une telle évolution se révèlerait fatale : elle impliquerait une période trop longue sans possibilité de chasse des phoques annelés, amenant inévitablement l'espèce à l'extinction.
Les glaces de l'Arctique : un pivot climatique
Le sort de l'ours polaire ne préoccuperait sans doute pas grand monde s'il n'était pas inextricablement lié à celui de la planète. Les glaces de l'Arctique sont en effet vitales pour l'équilibre climatique de la Terre. Leur disparition entraînerait une "surchauffe" dont il est impossible de mesurer les conséquences. Le gouverneur Palin a raison : le classement en espèce menacée de l'ours polaire est très préoccupante pour l'Alaska. En fait, elle est même très préoccupante pour l'ensemble des habitants de cette planète.
Image : au Spitzberg...
Ces derniers temps, Sarah Palin, gouverneur républicaine de l'Etat d'Alaska, voit les ours polaires d'un mauvais oeil. Ces derniers ne viennent-ils pas d'être classés de façon fort inopportune sur la liste des espèces menacées des Etats-Unis ? La nouvelle n'augure rien de bon pour les plantigrades. Mais pour Mme Palin, elle n'augure surtout rien de bon pour l'économie de l'Alaska. L'ours polaire classé, ce sont les côtes nord et nord-ouest de l'état qui risquent de devenir inaccessibles à l'exploitation pétrolière et gazéifère... et des millions de dollars d'investissement qui risquent de s'envoler en fumée.

Indissociable alliance
Pourtant, les faits semblent donner raison à ces cassandres : si l'ours polaire se porte encore bien, la glace arctique dont sa survie dépend se porte, elle, plutôt mal. Au rythme actuel, l'Arctique pourrait être totalement dégelé en été vers le milieu du 21ème siècle selon Environnement Canada. Les investisseurs se frotteront sans doute les mains à cette nouvelle, qui offre des opportunités économiques inédites (transport maritime plus rapide, exploitation de gisement pétrolifère inaccessibles actuellement). Pour les ours polaires toutefois, une telle évolution se révèlerait fatale : elle impliquerait une période trop longue sans possibilité de chasse des phoques annelés, amenant inévitablement l'espèce à l'extinction.
Les glaces de l'Arctique : un pivot climatique
Le sort de l'ours polaire ne préoccuperait sans doute pas grand monde s'il n'était pas inextricablement lié à celui de la planète. Les glaces de l'Arctique sont en effet vitales pour l'équilibre climatique de la Terre. Leur disparition entraînerait une "surchauffe" dont il est impossible de mesurer les conséquences. Le gouverneur Palin a raison : le classement en espèce menacée de l'ours polaire est très préoccupante pour l'Alaska. En fait, elle est même très préoccupante pour l'ensemble des habitants de cette planète.
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mardi 3 juillet 2007
Consommation énergétique d'un 4x4 américain : enfin des chiffres!
Ce week-end, Nicolas et moi sommes allés au festival de jazz à Montréal.
Bus ou voiture?
Nous avons longuement réfléchi au cours des dernières semaines à la façon dont nous allions parcourir les 500 kms qui nous sépare du Québec. Après avoir comparé le coût d'un trajet en bus Greyhound (146$ par personne et 7 heures de trajet) et les tarifs proposés par les différentes agences de location de voiture (140$ pour 3 jours), nous avons opté, par égard pour notre portefeuille, pour la location.
A notre arrivée dans les locaux de l'agence, nous avons appris que la voiture que nous avions réservée, un modèle compact, la Chevrolet Aveo, n'était plus disponible. Cela ne devait toutefois pas nous inquiéter, nous a expliqué un employé : on allait nous offrir à la place un "petit 4x4". A son expression enthousiaste, nous avons compris qu'il s'agissait là d'un beau cadeau, qui méritait certainement une prime pour le service à la clientèle. Mais son sourire s'est figé quand il a constaté notre manque d'enthousiasme. Il a tenté tant bien que mal de répondre à nos questions soupçonneuses concernant la consommation d'essence du modèle en question, nous a expliqué que la voiture était "bien plus amusante à conduire" et en désespoir de cause, a fini par nous signifier que de toute façon, c'était ça ou rien.
Voilà donc comment nous nous sommes retrouvés avec "ça", une Ford Escape qui n'avait rien de petit, surtout pas sa consommation de carburant.

Nous avons en effet consommé 122 litres d'essence, pour 1000 kms parcourus quasiment uniquement sur autoroute, ce qui représente une consommation moyenne de 12 litres aux 100 kms et équivaut, après vérification sur le calculateur à carbone d'ICLEI, à l'émission de 150 kg par personne de CO2 dans l'atmosphère (soit un peu moins d'1/3 des émissions annuelles d'un Chinois). Le même trajet effectué dans une petite voiture européenne aurait divisé par deux notre facture d'essence et nos émissions de CO2.
Les sombres lendemains du 4x4
Comme 98% des 4x4, notre voiture n'a pas quitté l'asphalte. Et comme la majorité des conducteurs de 4x4, nous aurions très bien pu nous contenter d'une voiture compacte de type européen. Si la proposition de loi adoptée par le Sénat il y a deux semaines est validée, l'âge d'or du 4x4 risque d'ailleurs fort d'être menacé : comme le font remarquer les constructeurs automobiles, il est difficile de faire passer l'efficacité énergétique d'un véhicule de 12 litres aux 100 kms à 8 litres aux 100 kms sans en diminuer la taille. Serait-ce donc déjà la fin de "l'amusement au volant"?
Source photo : Sophie
Bus ou voiture?
Nous avons longuement réfléchi au cours des dernières semaines à la façon dont nous allions parcourir les 500 kms qui nous sépare du Québec. Après avoir comparé le coût d'un trajet en bus Greyhound (146$ par personne et 7 heures de trajet) et les tarifs proposés par les différentes agences de location de voiture (140$ pour 3 jours), nous avons opté, par égard pour notre portefeuille, pour la location.
A notre arrivée dans les locaux de l'agence, nous avons appris que la voiture que nous avions réservée, un modèle compact, la Chevrolet Aveo, n'était plus disponible. Cela ne devait toutefois pas nous inquiéter, nous a expliqué un employé : on allait nous offrir à la place un "petit 4x4". A son expression enthousiaste, nous avons compris qu'il s'agissait là d'un beau cadeau, qui méritait certainement une prime pour le service à la clientèle. Mais son sourire s'est figé quand il a constaté notre manque d'enthousiasme. Il a tenté tant bien que mal de répondre à nos questions soupçonneuses concernant la consommation d'essence du modèle en question, nous a expliqué que la voiture était "bien plus amusante à conduire" et en désespoir de cause, a fini par nous signifier que de toute façon, c'était ça ou rien.
Voilà donc comment nous nous sommes retrouvés avec "ça", une Ford Escape qui n'avait rien de petit, surtout pas sa consommation de carburant.
Nous avons en effet consommé 122 litres d'essence, pour 1000 kms parcourus quasiment uniquement sur autoroute, ce qui représente une consommation moyenne de 12 litres aux 100 kms et équivaut, après vérification sur le calculateur à carbone d'ICLEI, à l'émission de 150 kg par personne de CO2 dans l'atmosphère (soit un peu moins d'1/3 des émissions annuelles d'un Chinois). Le même trajet effectué dans une petite voiture européenne aurait divisé par deux notre facture d'essence et nos émissions de CO2.
Les sombres lendemains du 4x4
Comme 98% des 4x4, notre voiture n'a pas quitté l'asphalte. Et comme la majorité des conducteurs de 4x4, nous aurions très bien pu nous contenter d'une voiture compacte de type européen. Si la proposition de loi adoptée par le Sénat il y a deux semaines est validée, l'âge d'or du 4x4 risque d'ailleurs fort d'être menacé : comme le font remarquer les constructeurs automobiles, il est difficile de faire passer l'efficacité énergétique d'un véhicule de 12 litres aux 100 kms à 8 litres aux 100 kms sans en diminuer la taille. Serait-ce donc déjà la fin de "l'amusement au volant"?
Source photo : Sophie
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mardi 19 juin 2007
Et si le régime démocratique était incapable de gérer le problème climatique?

Caricature de Clay Bennett
"La démocratie n'est pas armée pour mener des guerres à long terme". C'est ainsi que le Christian Science Monitor résume la "cacophonie climatique" qui règne actuellement à Washington, remarquant avec une certaine amertume que les intérêts individuels ne sont pas forcément compatibles avec les intérêts d'une nation.E pluribus unum...
Il faut reconnaître que la situation actuelle amène à s'interroger. Alors que les Démocrates, forts de leur majorité, réfléchissent tant bien que mal à une ou plusieurs solution(s) pour réduire les émissions de gaz à effet de serre nationales, les divergences de priorités individuelles éclatent au grand jour.
Quel point commun y-a t'il en effet entre le Michigan, qui lutte bec et ongle pour sauver une industrie automobile mal en point, et la Californie, éprouvée par une sécheresse catastrophique, et dont la population s'inquiète des conséquences d'un monde plus chaud? Ou entre le lobby du charbon, qui milite activement pour la mise en place de subventions favorisant la production de charbon liquide en tant que carburant, et certains juristes de Washington, qui souhaitent quant à eux que toutes les centrales du pays produisent au moins 15% d'énergie renouvelable? Ou entre la position anti-nucléaire d'associations environnementales comme GreenPeace et celle de ces mêmes juristes?
... valable uniquement en temps de crise bien perceptible par l'opinion?
Il n'est pas facile d'obtenir un consensus dans un pays de 300 millions d'habitants. Il est encore plus difficile d'obtenir un consensus qui corresponde aux intérêts réels de la nation. Malgré une réelle prise de conscience, le public américain n'est aujourd'hui pas vraiment alarmé par le problème du réchauffement climatique ; selon un sondage réalisé en juillet 2006 par le Pew Research Center, seuls 19% des Américains se disent "très inquiets face au réchauffement climatique", soit un niveau d'inquiétude uniquement comparable à celui des Chinois. Il faudra encore du temps avant qu'une volonté publique claire parvienne à contrebalancer les intérêts particuliers des uns et des autres.
D'ici là, les politiciens, élus par et pour le peuple, continueront à se disputer sur la nécessité d'informer ou non les écoliers américains de l'impact environnemental négatif résultant de la circulation de bus vides (le projet de loi ne prévoit à priori pas d'intégrer les camions vides à cette intéressante séance d'information). Au moins, comme le fait remarquer ironiquement le Christian Science Monitor, les juristes de Washington ne peuvent pas vraiment empirer la situation...
mardi 12 juin 2007
La bataille du lobby automobile

"Tu veux acheter un pick-up? Tu sais ce que le Congrès envisage de faire? Ils veulent imposer des limitations énergétiques aux camions et aux 4*4, comme celles qui existent déjà pour les voitures. Tu vas voir, ça va faire vraiment faire monter les prix!" C'est ainsi que se termine une récente publicité télévisée de 30 secondes diffusées par l'Alliance of Automobile Manufacturers dans 10 Etats particulièrement friands en véhicules utilitaires et reportée par Business Week dans son dernier numéro.
Des régulations devenues inévitables
Cette publicité est un nouvel épisode de la bataille du lobby automobile face à la menace grandissante de régulations énergétiques qui pèse sur les véhicules utilitaires américains. Pourtant, il est difficile de nier qu'une telle régulation est devenue indispensable. La dernière loi visant à augmenter l'efficacité énergétique des véhicules date de 1975 et les standards appliqués (qui ne ne concernent pas les véhicules utilitaires et sont d'une manière générale dépassés) n'ont presque pas bougé depuis 1985. Les Etats-Unis sont à la traîne, très à la traîne même, en matière d'efficacité énergétique de leurs véhicules, ce qui nuit à leur compétitivité internationale.
Mais pour les géants de l'automobile américains, la compétitivité internationale n'a aujourd'hui pas beaucoup d'importance face à la perte potentielle d'un de leur marché les plus lucratifs : les véhicules utilitaires. Pour contrer cette menace, le lobby automobile mène depuis des mois une guerre médiatique.
De la victimisation...
Tout en clamant sa volonté de protéger l'environnement, l'Alliance of Automobile Manufacturers (qui regroupe General Motors, Ford, DaimlerChrysler, BMW et Toyota) se plaint ainsi sur son site internet d'être "le seul secteur de l'économie américaine à subir des contraintes en terme d'émissions de carbone". Une telle situation est évidemment intolérable, puisque "le problème du changement climatique est un problème qui n'a pas une seule cause directe". L'avis du lobby automobile est clair : le Congrès devrait commencer par promouvoir des technologies "propres" comme l'éthanol avant de persécuter l'industrie automobile.
... à la désinformation
Les constructeurs américains avancent également l'argument sacro-saint aux Etats-Unis de la liberté de choix du consommateur : "si nous devons augmenter l'efficacité énergétique des véhicules, nous serons contraints d'en réduire la taille. Le consommateur ne sera plus libre de choisir en fonction de ses propres priorités", annonce ainsi un autre spot télévisé.
Il est toutefois regrettable que lesdites "priorités" semblent reposer en partie sur de la désinformation. Selon Business Week, les ventes des très polluants véhicules utilitaires sont restées stables ces dernières années (autour de 28%), alors même qu'il apparait que 98% de ces véhicules ne sortiront jamais des routes goudronnées et que le prix du carburant ne cesse de grimper. Cette loyauté semble due à la croyance très répandue que la conduite d'un véhicule utilitaire est plus sure. Or, d'après un article publié dans le New Yorker en 2004, rien n'est plus faux. Les conducteurs de la Ford Explorer, le 4*4 le plus vendu aux Etats-Unis, courent 88 risques sur un million de mourir dans un accident de voiture, alors que le risque est plus de deux fois moindre pour les conducteurs d'une voiture de taille moyenne comme la Toyota Camri. Cette différence est liée au fait que le conducteur de la Toyota Camri, conscient de sa vulnérabilité face à des véhicules deux fois plus lourds, sera tout simplement plus prudent. Voilà une "priorité" que les constructeurs semblent curieusement avoir oublié de mentionner...
Sources :
Business Week, June 11, 2007. Selling the SUV status quo.
The New Yorker, January 12, 2004. Big and bad.
Photo : http://img.netcarshow.com/Ford-Explorer_2006_1600x1200_wallpaper_01.jpg
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vendredi 8 juin 2007
G8 : ni noir, ni blanc
L'improbable compromis climatique du G8
Après une semaine d'intenses spéculations médiatiques, j'ai constaté aujourd'hui avec surprise un relatif désintérêt de la presse pour l'issue des négociations climatiques qui se sont tenues ces derniers jours au sommet du G8 à Heiligendamm en Allemagne.
Le débat a pourtant fait rage au bord de la Baltique. Jusqu'au bout, les partisants d'une politique chiffrée de réduction des émissions et d'un début de réflexion sur la politique climatique internationale après 2012 (date d'expiration du protocole de Kyoto) ont semblé craindre que les Etats-Unis ne bloquent complètement les discussions. Le potentiel d'un dérapage diplomatique sur la question climatique a fait couler beaucoup d'encre des deux côtés de l'Atlantique.
Enfin un début d'engagement américain
C'est sans doute l'absence de dérapage qui explique la soudaine indifférence des médias. Le sommet s'est en effet conclu par un accord qui semble satisfaire les deux partis. Du côté européen, les journaux français et allemands vantent l'efficacité diplomatique d'Angela Merkel. Ils se félicitent du fait que les Américains ont pour la première fois accepté l'idée de participer à des négociations visant à mettre en place les fondations d'un nouvel accord climatique international pour succéder à Kyoto (on remarquera tout de même que cette participation théorique a été fixée à 2009, ce qui permet à M. Bush de terminer son mandat sans se mouiller les mains). Par ailleurs, les Etats-Unis ont déclaré jeudi qu'ils allaient "sérieusement considérer" le plan européen de réduction des émissions de 50% d'ici à 2050, ce qui ne les engage pas à grand chose.
... mais toujours pas d'objectifs chiffrés
Côté américain, on semble considérer (quand on en parle) que les Européens ont plié face à l'administration Bush, qui avait déclaré avant le sommet refuser catégoriquement la mention d'objectifs chiffrés de réductions des émissions dans le rapport final du sommet. Par ailleurs, les Européens ont accepté l'idée récemment formulée par le Président Bush de réunir les 15 plus grands émetteurs de gaz à effet de serre mondiaux afin de fixer des objectifs nationaux de réduction des émissions.
Et une diminution des capacités à observer le phénomène
Malgré leurs déclarations d'intention, les Etats-Unis ont-ils réussi à retarder leur engagement dans une coopération internationale sur la question climatique? Sans doute. Mais si l'on en croit le Christian Science Monitor et le Kansas City Star, l'Amérique sera bientôt contrainte de coopérer (au moins scientifiquement) avec l'Europe dans le cadre climatique. L'Associated Press vient en effet de déterrer un rapport confidentiel adressé à la Maison Blanche, qui avertit cette dernière des conséquences d'importantes réductions du budget satellites américain. La récente décision de focaliser les satellites nationaux sur la prévision météorologique à court terme devraient en effet obliger les scientifiques américains à dépendre des données récoltées par les Européens pour suivre l'évolution du changement climatique. Voilà qui ne manque pas de sel, venant d'une administration qui a toujours été une grande avocate du "mesurons avant d'agir"...
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vendredi 25 mai 2007
les enseignements du Clean Air Act
Un nouveau Clean Air Act?
J'ai assisté à une conférence au MIT Energy Club donnée par Michael Bradley, le directeur du bureau d'étude M.J.Bradley&Associates, qui est spécialisé dans le conseil en politique énergétique auprès des entreprises et des gouvernements locaux.
Fort de nombreuses années d'expérience dans le domaine de la politique environnementale, Mr. Bradley a établi un parrallèle intéressant entre la bataille qui fait rage aujourd'hui à Washington sur la question du changement climatique et celle qui a fait rage lors de la mise en place du Clean Air Act en 1970.
De la régulation des Etats à la régulation fédérale
Le Clean Air Act correspond à une série de lois visant à réguler le niveau de pollution aérienne aux Etats-Unis. Dans ses premières versions, le Clean Air Act laissait le soin aux différents Etats de déterminer eux-même le niveau de pollution aérienne qu'ils jugeaient acceptable. Depuis 1970, c'est un organisme fédéral, l'Environmental Protection Agency (EPA), qui est chargé de définir les concentrations maximales acceptables des différents polluants aériens. Chaque Etat est ensuite tenu de faire appliquer sur son territoire des standards au moins aussi contraignants que ceux fixés au niveau fédéral.
Selon Michael Bradley, la situation actuelle au niveau de la lutte contre le changement climatique ressemble fortement au paysage politique que l'on pouvait observer dans les années 60. Faute de législation au niveau fédéral, les Etats-Unis sont aujourd'hui composés d'un patchwork d'initiatives volontaires locales, regroupant souvent des Etats aux intérêts économiques comparables (le Nord-Est, les grandes plaines, les Etats de l'Ouest).
La prise de position du secteur privé
Ces derniers temps, les acteurs du secteur privé ont commencé à joindre leurs voix à celles de tous ceux qui souhaitent une législation au niveau fédéral, créant une dynamique difficile à ignorer à Washington. Face à des niveaux d'exigences très variés, les entreprises nationales se heurtent en effet à un casse-tête sans fin pour s'adapter aux contraintes spécifiques à chaque Etat. Les Etats souhaitent également la mise en place d'une législation fédérale, ainsi qu'ils l'ont montré lors du jugement de l'EPA par la Cour Suprême début avril.
Une législation comparable à celle de l'Union Européenne
On peut imaginer que la législation que l'Etat fédéral mettra en place aura des ressemblances avec le Clean Air Act. D'après Michael Bradley, elle a pour l'instant toutes les chances de s'adresser à l'ensemble de l'économie plutôt qu'à quelques secteurs-clé et d'être basée sur le principe européen du marché carbone. Toutefois, contrairement à ce qui s'est pratiqué dans l'Union Européenne, les permis de pollution seront probablement plutôt vendus aux entreprises que distribués gratuitement.
Reste à savoir quand une telle législation sera mise en place... Michael Bradley est peu optimiste: "il a fallu des années pour que le Clean Air Act soit adopté. Sachant que l'administration actuelle ne fera pas un mouvement dans le sens d'une régulation des émissions, je ne pense pas que nous puissions espérer un vrai changement de politique avant 2009 (année présidentielle aux Etats-Unis)".
J'ai assisté à une conférence au MIT Energy Club donnée par Michael Bradley, le directeur du bureau d'étude M.J.Bradley&Associates, qui est spécialisé dans le conseil en politique énergétique auprès des entreprises et des gouvernements locaux.
Fort de nombreuses années d'expérience dans le domaine de la politique environnementale, Mr. Bradley a établi un parrallèle intéressant entre la bataille qui fait rage aujourd'hui à Washington sur la question du changement climatique et celle qui a fait rage lors de la mise en place du Clean Air Act en 1970.
De la régulation des Etats à la régulation fédérale
Le Clean Air Act correspond à une série de lois visant à réguler le niveau de pollution aérienne aux Etats-Unis. Dans ses premières versions, le Clean Air Act laissait le soin aux différents Etats de déterminer eux-même le niveau de pollution aérienne qu'ils jugeaient acceptable. Depuis 1970, c'est un organisme fédéral, l'Environmental Protection Agency (EPA), qui est chargé de définir les concentrations maximales acceptables des différents polluants aériens. Chaque Etat est ensuite tenu de faire appliquer sur son territoire des standards au moins aussi contraignants que ceux fixés au niveau fédéral.
Selon Michael Bradley, la situation actuelle au niveau de la lutte contre le changement climatique ressemble fortement au paysage politique que l'on pouvait observer dans les années 60. Faute de législation au niveau fédéral, les Etats-Unis sont aujourd'hui composés d'un patchwork d'initiatives volontaires locales, regroupant souvent des Etats aux intérêts économiques comparables (le Nord-Est, les grandes plaines, les Etats de l'Ouest).
La prise de position du secteur privé
Ces derniers temps, les acteurs du secteur privé ont commencé à joindre leurs voix à celles de tous ceux qui souhaitent une législation au niveau fédéral, créant une dynamique difficile à ignorer à Washington. Face à des niveaux d'exigences très variés, les entreprises nationales se heurtent en effet à un casse-tête sans fin pour s'adapter aux contraintes spécifiques à chaque Etat. Les Etats souhaitent également la mise en place d'une législation fédérale, ainsi qu'ils l'ont montré lors du jugement de l'EPA par la Cour Suprême début avril.
Une législation comparable à celle de l'Union Européenne
On peut imaginer que la législation que l'Etat fédéral mettra en place aura des ressemblances avec le Clean Air Act. D'après Michael Bradley, elle a pour l'instant toutes les chances de s'adresser à l'ensemble de l'économie plutôt qu'à quelques secteurs-clé et d'être basée sur le principe européen du marché carbone. Toutefois, contrairement à ce qui s'est pratiqué dans l'Union Européenne, les permis de pollution seront probablement plutôt vendus aux entreprises que distribués gratuitement.
Reste à savoir quand une telle législation sera mise en place... Michael Bradley est peu optimiste: "il a fallu des années pour que le Clean Air Act soit adopté. Sachant que l'administration actuelle ne fera pas un mouvement dans le sens d'une régulation des émissions, je ne pense pas que nous puissions espérer un vrai changement de politique avant 2009 (année présidentielle aux Etats-Unis)".
vendredi 18 mai 2007
La guerre perdue de Georges Bush
Républicain avec une majorité Démocrate
Les temps sont durs pour le président Bush. Depuis l'élection de novembre 2006, qui a renversé les rapports de force dans les deux chambres du Congrès en assurant une majorité démocrate, le débat fait rage à Washington.
Sans surprise, le principal point de friction entre l'exécutif et le législatif concerne la guerre en Irak. Le renversement politique du pays est en effet en bonne partie dû à la perte de confiance d'une opinion publique fatiguée de voir les troupes américaines s'enliser dans le conflit irakien. Mais la politique environnementale de l'administration Bush est aussi un sujet brûlant.
D'après un sondage réalisé par le Pew Research Center en juillet 2006, 51% des Américains désapprouvent la politique environnementale de Washington. Les électeurs ne semblent pas avoir d'opinion très définie sur la politique fédérale dans le cadre du changement climatique (44% de désapprobation, 26% d'approbation et 30% d'indécis), mais ils sont par contre 2 sur 3 à désapprouver clairement la politique énergétique du gouvernement.
"Le sérieux problème" de Georges Bush
Face à une opinion publique réprobatrice et un Congrès qui prépare activement des propositions de lois visant à imposer des standards d'efficacité d'utilisation de l'essence plus contraignants pour l'industrie automobile (au grand dam de cette dernière), Bush se retrouve le dos au mur. Du bout des lèvres, il a admis en janvier 2007 lors de son discours sur l'Etat de l'Union que "le changement climatique était un sérieux problème", reconnaissant ainsi implicitement pour la première fois l'existence du phénomène...
Il ne faut toutefois pas trop lui en demander. Après avoir annoncé dans ce même discours qu'il comptait réduire la croissance prévue des émissions de 20% en 10 ans (en se gardant bien de préciser en termes concrets comment il comptait atteindre cet objectif peu ambitieux), Mr. Bush a renouvellé son refus d'instaurer des quotas d'émissions sur le sol américain lors du sommet Union Européenne/Etats-Unis qui s'est tenu au mois d'avril.
La bataille de l'EPA
Mais si l'administration Bush est restée intraitable sur le terrain international, elle a subi ces dernières semaines une estocade historique au niveau national. La Cour Suprême a en effet tranché début avril en sa défaveur dans un cas juridique qui l'opposait à 10 états souhaitant la mise en place d'un contrôle fédéral sur les émissions de gaz à effet de serre des automobiles.
Le cas impliquait l'Environmental Protection Agency (EPA), une agence fédérale chargée de faire respecter au niveau national les standards d'émissions d'un certain nombre de produits chimiques susceptibles de représenter des sources de pollution. Depuis quelques années, l'EPA refusait de trancher sur le cas du CO2, au motif douteux que son "impact sur l'environnement ne faisait pas l'objet d'un consensus scientifique". Le 2 avril, la Cour Suprême du Massachusetts lui a donné tort et l'a sommée d'exécuter son rôle de contrôle, à moins qu'elle ne soit capable de déterminer scientifiquement qu'une régulation n'était pas nécessaire.
Visiblement, ladite "détermination scientifique" a été difficile à fournir, car le président Bush vient d'annoncer qu'il avait ordonné à son administration de plancher sur la mise en place de standards automobiles. Ceux-ci devraient normalement être prêts fin 2008, soit quelques semaines avant la fin du mandat du président. L'honneur sera donc sauf... Jusqu'à la prochaine bataille.
Les temps sont durs pour le président Bush. Depuis l'élection de novembre 2006, qui a renversé les rapports de force dans les deux chambres du Congrès en assurant une majorité démocrate, le débat fait rage à Washington.
Sans surprise, le principal point de friction entre l'exécutif et le législatif concerne la guerre en Irak. Le renversement politique du pays est en effet en bonne partie dû à la perte de confiance d'une opinion publique fatiguée de voir les troupes américaines s'enliser dans le conflit irakien. Mais la politique environnementale de l'administration Bush est aussi un sujet brûlant.
D'après un sondage réalisé par le Pew Research Center en juillet 2006, 51% des Américains désapprouvent la politique environnementale de Washington. Les électeurs ne semblent pas avoir d'opinion très définie sur la politique fédérale dans le cadre du changement climatique (44% de désapprobation, 26% d'approbation et 30% d'indécis), mais ils sont par contre 2 sur 3 à désapprouver clairement la politique énergétique du gouvernement.
"Le sérieux problème" de Georges Bush
Face à une opinion publique réprobatrice et un Congrès qui prépare activement des propositions de lois visant à imposer des standards d'efficacité d'utilisation de l'essence plus contraignants pour l'industrie automobile (au grand dam de cette dernière), Bush se retrouve le dos au mur. Du bout des lèvres, il a admis en janvier 2007 lors de son discours sur l'Etat de l'Union que "le changement climatique était un sérieux problème", reconnaissant ainsi implicitement pour la première fois l'existence du phénomène...
Il ne faut toutefois pas trop lui en demander. Après avoir annoncé dans ce même discours qu'il comptait réduire la croissance prévue des émissions de 20% en 10 ans (en se gardant bien de préciser en termes concrets comment il comptait atteindre cet objectif peu ambitieux), Mr. Bush a renouvellé son refus d'instaurer des quotas d'émissions sur le sol américain lors du sommet Union Européenne/Etats-Unis qui s'est tenu au mois d'avril.
La bataille de l'EPA
Mais si l'administration Bush est restée intraitable sur le terrain international, elle a subi ces dernières semaines une estocade historique au niveau national. La Cour Suprême a en effet tranché début avril en sa défaveur dans un cas juridique qui l'opposait à 10 états souhaitant la mise en place d'un contrôle fédéral sur les émissions de gaz à effet de serre des automobiles.
Le cas impliquait l'Environmental Protection Agency (EPA), une agence fédérale chargée de faire respecter au niveau national les standards d'émissions d'un certain nombre de produits chimiques susceptibles de représenter des sources de pollution. Depuis quelques années, l'EPA refusait de trancher sur le cas du CO2, au motif douteux que son "impact sur l'environnement ne faisait pas l'objet d'un consensus scientifique". Le 2 avril, la Cour Suprême du Massachusetts lui a donné tort et l'a sommée d'exécuter son rôle de contrôle, à moins qu'elle ne soit capable de déterminer scientifiquement qu'une régulation n'était pas nécessaire.
Visiblement, ladite "détermination scientifique" a été difficile à fournir, car le président Bush vient d'annoncer qu'il avait ordonné à son administration de plancher sur la mise en place de standards automobiles. Ceux-ci devraient normalement être prêts fin 2008, soit quelques semaines avant la fin du mandat du président. L'honneur sera donc sauf... Jusqu'à la prochaine bataille.
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