lundi 28 avril 2008

Rouler ou manger, faut-il choisir ?


Il y a quelques mois, un scientifique britannique rencontré lors d'une conférence me prédisait sombrement que les biocarburants ne se développeraient jamais : ce sont de trop bons boucs émissaires.

Versatile opinion...

Alors que le monde découvre avec effarement la hausse du prix des denrées agricoles et les "émeutes de la faim", force m'est de constater qu'il avait raison. Après les avoir encensés au point d'en faire la solution-miracle, la presse est aujourd'hui unanime à les condamner, pour le plus grand bonheur des anti-écologistes ("enfin, les motivations profondes des écologistes apparaissent au grand jour, ils ne souhaitent qu'affamer la planète") et des anti-capitalistes ("voilà ce qui se passe quand on encourage l'agriculture productiviste, nous vous l'avions bien dit").

Un procès équitable?

Mais les biocarburants sont-ils réellement responsables des émeutes de la faim? Ce serait leur faire trop d'honneur. Certes, ils jouent un rôle non négligeable dans la hausse du prix du maïs. Seulement voilà, pendant toute l'envolée des cours, le maïs est resté -et de très loin- la céréale la... moins chère au niveau mondial. Curieusement d'ailleurs, les émeutiers s'en plaignent peu : ils sont plutôt focalisés sur le prix du blé et du riz, qui sont de toute façon bien plus consommées en alimentation humaine.

Instable équilibre

Dans ce cas, d'où vient le problème? Des vieilles lois de l'offre et la demande. Alors que la demande en céréales est en augmentation régulière afin de satisfaire les besoins croissants en produits carnés de la population mondiale, l'offre, elle, a bien du mal à suivre. A l'heure actuelle, il suffit d'un incident climatique pour que la récolte devienne inférieure aux besoins mondiaux. L'année dernière, pour la quatrième fois depuis 2002, la demande a ainsi excédé l'offre, suite à des mauvaises récoltes dans de nombreuses zones de production du blé. Et les stocks se sont à nouveau réduits comme peau de chagrin...

La récolte de céréales sera peut-être meilleure cette année. Mais ne nous y trompons pas : il y aura d'autres incidents climatiques, qui entraîneront leur lot de difficulté alimentaire. Dans un monde où la classe moyenne est en pleine expansion, peut-être est-il temps de repenser l'alimentation des pays riches ?

Bienvenue dans le 21ème siècle.

Image 1 :
Demain, roulerez vous au biocarburant ?
Image 2 :
Prix international des céréales, FAO