mardi 22 mai 2007

1491 ou la fin du mythe du bon sauvage

Walden et le mouvement environnementaliste

Je vis dans le Massachussetts, la terre d’origine de l’un des grands écrivains américains du 19ème siècle, Henri David Thoreau. Thoreau est surtout célèbre pour Walden, une œuvre à caractère philosophique qui décrit sa quête d’un mode de vie plus proche de la nature et en harmonie avec la sagesse indienne.

Thoreau a basé sa réflexion sur l’idée que l’Amérique était initialement habitée par des tribus indiennes peu nombreuses et n’ayant que peu d’impact sur leur environnement. Dans cette vision, le continent américain pouvait se comparer à un vaste jardin d’Eden, qui fut détruit par l’arrivée des Européens. La dégradation de la nature fut tellement importante que dès la fin du 19ème siècle, les habitants des Etats-Unis se montrèrent soucieux d’empêcher l’exploitation de certains espaces naturels uniques et créèrent à Yellowstone le premier parc national au monde.

Cette image édénique de l’Amérique précolombienne a encore des conséquences aujourd’hui. Elle est en effet à l’origine de la philosophie de préservation d’une nature sauvage qui est souvent prônée par le mouvement environnementaliste, incarné par des associations comme GreenPeace.

L'Eden américain, un mythe?

Pourtant, cette image pourrait bien n’être qu’un mythe. D’après 1491, une œuvre de vulgarisation réalisée par un journaliste scientifique acclamée par les critiques, les dernières recherches menées sur le Nouveau Monde devraient nous inciter à réviser radicalement notre vision de celui-ci.

Avant l’arrivée des premiers Européens, l’Amérique aurait été le continent le plus peuplé de la terre. Les Amérindiens avaient développé des civilisations complexes, qui nécessitaient une grande maîtrise de l’environnement. Le Sud-Est des Etats-Unis était ainsi presque entièrement cultivé. Quant aux grandes plaines ou aux forêts du Nord-Est, elles faisaient l’objet d’une gestion très poussée par le feu, qui favorisait la présence de grands herbivores idéaux pour la chasse.

Le cataclysme de 1492

Mais malgré toute la complexité de leurs civilisations, les habitants des Amériques possédaient une faiblesse : ils étaient particulièrement sensibles à des maladies comme la rougeole, avec lesquelles ils n’avaient jamais été en contact. L’arrivée des premiers Européens entraîna une épidémie d’une ampleur historique inégalée. Selon certains chercheurs, 95% de la population américaine fut décimée en un siècle. Ils estiment par exemple que la population du centre du Mexique passa de 22,5 millions d’habitants en 1519, année où Cortès débarqua, à 700 000 habitants en 1620… On imagine l’impact d’une telle perte démographique : les survivants furent subitement privés de l’architecture sociale indispensable au maintien de leurs traditions.

Trop peu nombreux, les Amérindiens laissèrent les écosystèmes soigneusement entretenus par le passé à l’abandon. La forêt gagna du terrain. Faute de chasseurs, les populations de bisons et de pigeons explosèrent littéralement, créant le sentiment d’abondance miraculeuse relatée par les Européens. Les Amérindiens affaiblis rencontrés par les colons laissèrent l’impression de peuples trop « primitifs » pour avoir eu un réel impact sur le continent. Et le mythe pris forme…

Le véritable héritage amérindien

Les recherches résumées dans 1491 sont d’une grande importance. Elles devraient nous aider à dépasser notre nostalgie d’une nature sauvage et vierge et à reconsidérer l’héritage que nous ont laissé les Amérindiens. Leur gestion du continent américain pendant des millénaires semble avoir été généralement fructueuse. Peut-être y a-t-il des leçons à en tirer en ce début de 21ème siècle ?


1491, Nouvelles Révélations sur les Amériques avant Christophe Colomb.
Charles C. Mann. Publié aux éditions Albin Michel. 2007.


3 commentaires:

Nico a dit…

J'aime beaucoup la nouvelle version!
Avec le lien Thoreau tout s'éclaire, je trouve.

Par contre le début pourrait être modifié. Du genre :
"Dans le Ma, que certains surnommèrent l'Athènes de l'Amérique (à moins que ce ne soit Boston?), j'ai la chance d'être sur la terre d'origine de ..."
C'est une modif mineure en fait.

Au fait, je ne sais pas si les commentaires des posts changent quand tu modifies le post. Ca va être l'occasion de voir!

Unknown a dit…

Tu piques ma curiosité endormi de thésard avec ce livre ? Est ce qu'il détaille réellement les structures des sociétés précolombiennes ou est ce qu'il les aborde uniquement de façon superficielle pour illustrer son propos?
Est ce qu'il explique comment il a pu "reconstituer" les civilisations précolombiennes? Ma culture en ce sujet se limitant aux têtes géantes des olmèques je me sens inculte ...
:-)

Anonyme a dit…

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