L'intuition de Fourier

De l'alpinisme à l'effet de serre

Tyndall attrape probablement le virus de l'alpinisme lors d'une visite de la Suisse en 1856. Dans les années qui suivront, il fera trois fois l'ascension du Mont Blanc et passera même une nuit au sommet avec une vingtaine de thermomètres (qui ne résisteront pas à l'expérience). Il fera ensuite en 1858 l'ascension en solitaire du Mont Rose (4634 m), et gravira le Weisshorn (4506 m) en 1861 et le Mont Cervin (4478 m) en 1865.
Son amour de la montagne l'amènera tout naturellement à s'intéresser à la météorologie. En 1859, il présente ainsi devant la Royal Society les résultats d'une expérience qui montrent que la "lumière obscure" (les rayonnements infrarouges modernes) est absorbée de façon variée par les différents gaz atmosphériques. Tyndall observe que la vapeur d'eau est le gaz à effet de serre le plus puissant et place en seconde position le dioxide de carbone (C02). Fort de ces observations, il suggère que les périodes de glaciation mises en évidence par le zoologiste suisse Louis Agassiz dans les années 1830 sont liées à des variations dans les concentrations atmosphériques de ces deux composés. Son intuition tombe plutôt juste : on pense aujourd'hui que les phases de glaciation et de déglaciation du Pléiostène sont effectivement liées à des variations des concentrations atmosphériques de la vapeur d'eau et du CO2, même si l'on s'interroge encore sur le phénomène qui a déclenché ces variations.
Tyndall meurt brusquement en 1893, lorsque sa jeune femme lui donne par erreur de l'hydrate de chloral à la place d'une cuillère à thé de magnésium. Au moment de cette tragédie, les connaissances accumulées dans le domaine de la thermodynamique ouvrent la voie au travail d'un chimiste suèdois, Svante Arrhenius, auteur de la première théorie complète sur l'effet de serre.
Les prédictions d'Arrhenius


Dans un premier temps, Arrhenius porte la responsabilité potentielle des éventuelles variations de la concentration en CO2 sur les éruptions volcaniques. Mais face à la quantité toujours croissante de charbon brûlé par les premières usines de la Révolution Industrielle, il émet en 1903 l'hypothèse que les activités humaines pourraient elles-aussi influencer la concentration atmosphérique de CO2. "Au rythme actuel, écrit-il, il faudra environ 3000 ans pour doubler le niveau de CO2 atmosphérique". Cette fois, Arrhenius se trompe lourdement. Au rythme que nous connaissons aujourd'hui, nous devrions en fait atteindre ce doublement au cours du 21ème siècle, soit moins de 200 ans après les prédictions du chimiste suèdois.
La suite de la saga, de 1903 à 1955 : Petite histoire de l'effet de serre (2)
Sources :
Données historiques : Thin Ice, de Mark Bowen
Photo 1 : Joseph Fourier (désolée pour sa tête applatie) http://physics.mtsu.edu/~wmr/fourier.jpeg
Photo 2 : vous l'avez reconnu, c'est bien sûr John Tyndall http://www.timbercon.com/History-of-Fiber-Optics/John-Tyndall-Physicist-Big.jpg
Photo 3 : Svante Arrhenius, prix Nobel de Chimie http://www.su.se/content/1/c4/35/74/Arrhenius-1903webb.jpg
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