vendredi 15 juin 2007

Discussion économique autour d'un café... (2)

Retour à cette soirée de discussions dans le Caffé dello Sport. Je vous ai donné hier l’opinion de notre vis-à-vis, ingénieur des Ponts et Chaussées en stage au MIT. Voici pourquoi nous ne sommes pas d'accord avec ce raisonnement.

1) Pourquoi 10 ans? C'est un délai arbitraire, non? Nous pourrions prendre 20 ans. Comme ça, on aurait le temps d'accumuler encore plus de bénéfices à réinvestir dans la lutte contre le changement climatique. Et quand nous arriverions à la date fixée, il nous suffirait de reconduire le raisonnement pour deux autres petites décennies (ou plus, ne soyons pas mesquins)...

2)
Depuis des décennies, l'économie mondiale montre une tendance à dépendre de plus en plus fortement des énergies fossiles. C'est leur abondance et leur faible coût qui permet la mondialisation, l'agriculture intensive, l'augmentation du nombre de supermarchés, le tourisme de masse, etc... A priori, cette tendance n'a pas de raisons de s'inverser dans la prochaine décennie, surtout avec le développement de pays comme la Chine ou l'Inde. On peut donc déduire sans prendre trop de risques que l'économie mondiale sera encore plus dépendante des énergies fossiles dans 10 ans. Il sera donc encore plus difficile (et coûteux) de réduire nos émissions à ce moment là.

3)
Cet aspect ne semble pas forcément très bien pris en compte par les économistes, mais les réserves de charbon, pétrole et gaz naturel sont limitées. Il parait donc raisonnable de dire que la décarbonisation de l'économie n'est à moyen terme pas une option, mais bel et bien une obligation. Nous n'avons pas aujourd'hui (et nous n'aurons pas plus dans 10 ans) de solutions techniques qui nous permettent de vivre sans énergies fossiles. Compte tenu de leur facilité d'utilisation et de leur faible coût, il n'y a d'ailleurs pas vraiment d'incitation aujourd'hui à réfléchir à un plan B. C'est pourquoi il est indispensable de rendre l'usage de ces ressources un peu moins facile si l'on souhaite enclencher une vraie réflexion pour trouver une solution à cet épineux problème. En l'occurence, plus vite on s'en occupe, plus on a de chance d'y arriver.

4)
L'un des aspects qui suscite le plus d'inquitétude dans la communauté scientifique en ce moment, c'est le fait qu'il semble que la réaction du climat à la hausse de la concentration de gaz à effet de serre (GES) dans l'atmosphère ne soit pas linéaire. En d'autres termes, au delà d'une certaine concentration de GES, le réchauffement provoqué favorise encore plus de réchauffement. Par exemple, le dégel du permafrost permettrait la libération dans l'atmosphère de très grandes quantités de carbone, jusque là stockées dans le sol, ce qui augmenterait encore le réchauffement climatique potentiel... Une étude récente publiée par une équipe internationale souligne ainsi qu'il semble urgent de réduire les émissions si l'on veut éviter un tel scénario. Face à de telles conclusions, une attente de 10 ans n'est-elle pas irresponsable?

Au fond, cette discussion n'est que le reflet d'un débat qui fait rage entre économistes en ce moment. Il a été déclenché de façon assez inattendue par les conclusions d'un économiste anglais, Nicholas Stern, au début de l'année. Et vous dans tout ça, quelle est votre opinion?

Première partie (l'opinion de l'ingénieur des Ponts) :
Discussion économique autour d'un café... (1)

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