vendredi 23 avril 2010

La phrase... de Bertrand Barré

"Dans mon enfance, avant 1950, nous écoutions la "TSF" à table, (...) notamment une émission à succès qui s'intitulait fièrement "40 millions de Français". (...) La télévision en noir et blanc était encore une curiosité hors de prix et la voiture un grand luxe. Nous sommes aujourd'hui 64 millions de Français avec, presque tous, télévision, voiture, téléphone portable, machine à laver, etc. A l'école, j'apprenais que l'empire des Indes comptait 400 millions d'habitants : Inde, Pakistan, Bangladesh totalisent aujourd'hui près du triple et leur mode de vie change très vite".

Ainsi parle Bertrand Barré, ingénieur spécialiste du nucléaire, dans un récent article publié par l'Expansion. Loin de représenter un accès de nostalgie un peu ringard, ces propos sont significatifs. Ils illustrent en effet le changement sans précédent qui a marqué l'humanité au cours des dernières décennies.

Selon l'ONU, la population mondiale a ainsi pratiquement triplé en deux générations, passant de 2,5 milliards d'humains en 1950 à presque 7 milliards en 2010. Durant la même période, le niveau de vie des individus a beaucoup augmenté. En regardant l'espérance de vie à la naissance, un indicateur qui reflète des aspects aussi variés que le taux de mortalité infantile, les politiques de santé publique et l'accès aux soins médicaux et à la nourriture, on constate une progression fulgurante des chiffres. Alors qu'en 1900, un Américain ou un Britannique avait une espérance de vie à la naissance de 47 ans, un bébé naissant dans les même pays aujourd'hui peut espérer vivre près de 80 ans. Dans un pays très pauvre, comme le Bangladesh, l'espérance de vie à la naissance est d'ores et déjà supérieure de plus de 15 ans (64 ans) à celle observée aux États-Unis et au Royaume-Uni en 1900.

Selon toute probabilité, ces différents chiffres ne vous sont pas totalement étrangers. Ils sont évoqués de manière suffisamment fréquente pour ne plus susciter qu'un intérêt modéré chez la plupart d'entre nous. Pourtant, ils sont loin d'être anodins. La conjonction de la hausse spectaculaire du niveau de vie et de la taille de la population explique en bonne partie l'envolée des émissions de gaz à effet de serre observée au cours des dernières décennies. Mais en plus d'être la cause du problème, ces deux évolutions conditionnent également les réponses que nous pouvons y apporter. En effet, il est probable que les réflexes hérités du passé, y compris du passé récent, se révèlent obsolètes dans le contexte actuel. Les solutions adaptées à un monde de 3 milliards d'humains (avant 1960) ou de 5 milliards d'humains (1990) ne sont probablement pas les plus à même de répondre aux besoins d'un monde de 7 milliards d'humains ou plus.

Quelque part au cours du 20ème siècle, l'humanité a changé l'échelle du problème auquel elle était confronté. Par là même, elle a également changé la nature du problème. Cet aspect n'est pas forcément bien intégré dans les solutions proposées pour le résoudre. Il serait pourtant important d'en tenir compte... car c'est rarement dans l'urgence que l'on se révèle le plus créatif.

Image : évolution démographique depuis le Néolithique. Source : musée de l'Homme

jeudi 22 avril 2010

Le plan B a le vent en poupe

Floraison d'articles scientifiques, annonce régulière de nouvelles subventions, succession de réunions et de comités scientifiques... ces derniers temps, la géo-ingénierie fait parler d'elle. Alors que le grand public reste focalisé sur le Climategate, le monde des sciences s'intéresse en effet de plus en plus à la question du "plan B" : comment retarder un changement climatique catastrophique dans un monde où les plans d'actions politiques se révèlent insuffisants ou pas assez rapides ?

Face à cette question pressante, les solutions proposées par la géo-ingénierie sont inventives, allant de la capture du CO2 atmosphérique par des arbres artificiels à l'installation dans l'atmosphère de miroirs réfléchissants les rayons solaires. En cas d'application, ces différentes mesures auraient un impact parfois difficile à prévoir pour l'ensemble des habitants de la planète. A ce titre, elles ne devraient pas être passées sous silence. En conséquence, elles seront décrites à l'avenir sur Le grand dégel, sous la rubrique géo-ingénierie.

mercredi 21 avril 2010

Des dangers de l'amour du vin

Pour une raison qui m'échappe, les sceptiques climatiques semblent nourrir une passion dévorante pour la Scandinavie et les zones qui s'y rattachent. Nous avons déjà débattu du cas du Groenland. Mais si j'en crois le commentaire récent d'un lecteur de la France Agricole, la Suède suscite également un engouement qui mérite d'être relevé.

Le point soulevé dans ce journal est le suivant : il y a 1000 ans (durant la fameuse période chaude médiévale), on faisait pousser de la vigne en Suède. Le climat actuel du pays ne le permet pas. Dans ces conditions, comment diable peut-on penser qu'il y a réchauffement climatique ?

Après une petite vérification, il semblerait que l'exemple de la Suède ne soit pas le plus pertinent, puisque la présence au Moyen-Age de vignobles dans certains monastères du sud du pays n'y est pas complètement attestée. Ce qui est sûr en revanche, c'est que cette région accueille aujourd'hui environ 10 hectares de vignes à destination commerciale.

Par ailleurs, l'existence de vignobles au Moyen-Age dans le nord de l'Europe peut être attribuée à des facteurs autres que le climat, tels que la nécessité de produire du vin de messe, moins facile à importer dans un monde où les déplacements étaient à la fois longs et coûteux.